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Table des matières

Il y a 100 ans ! – Le roi de Prusse en visite au lac d’Alfeld

François Sellier

4

Août 1914, l’évacuation des  » inutiles « 

Philippe Dattler

6

J’étais enfant à Auxelles-Bas pendant la Grande guerre

Jules-Paul Sarazin

7

L’escadrille C 34 de Romagny-sous-Rougemont

François Sellier

9

Joffre à Giromagny

Jean Demenus, François Sellier

17

Les visites du Président

François Sellier

18

Souvenirs de passage… présentés par

François Sellier

20

Les écoles de Valdoie pendant la Grand guerre

François Liebelin

22

Un certain 7 novembre 1918

François Sellier

24

Un lieu de mémoire, le monument aux morts d’Etueffont

Philippe Dattler

26

Rodolphe Sommer (roman) 12 – Le crime de Vaudrey

Pierre Haas

27

MAGAZINE

 

 

Le 150è anniversaire de l’abolition de l’esclavage – Champagney le 26 août 1998

André et Marie-Thérèse Olivier

34

La fête de Felon : continuité et changements

Dominique Dattler

36

À propos de deux objets trouvés Iors des fouilles du Vieux-Château de Rougemont

Jacques Labrot

38

Août 1914, l’évacuation des inutiles

La mobilisation qui prélude à la guerre fait passer les troupes chargées de la défense de Belfort de 7500 à près de 80000 hommes. Cet énorme accroissement pose des problèmes d’approvisionnement et d’ordre public. Le 3 août 1914 la guerre est déclarée. L’état de siège est proclamé. Le général Thévennet, commandant la place, fait placarder un arrêté :
« Le Général de Division, Gouverneur de Belfort…
Arrête :
– Les vieillards, les femmes, les enfants, les étrangers et toutes les personnes inutiles à la Défense, quitteront Belfort… »

À ces citadins qui doivent quitter la ville se joignent des habitants des villages du Sundgau qui se trouvent menacés par les combats. (voir à ce sujet l’article de J-P Sarazin, J’étais
enfant à Auxelles-Bas pendant la Grande guerre). L’essentiel des départs a lieu entre le 4 et le 15 août.
« Le Haut-Rhin Républicain » écrit le 11 août :
« Depuis vendredi chaque jour apporte un spectacle poignant. Des convois de femmes, d’enfants, les uns juchés sur les voitures-échelles, les autres suivant à pied, se dirigent vers la gare, escortés de quelques territoriaux et de quelques gardes civils. Ce sont les « bouches inutiles » qui quittent Belfort… Nous saluons les pauvres gens que la défense de la Place arrache à leurs foyers… Mais ce sacrifice porte en soi sa récompense… Regardons l’avenir avec confiance ! »
Comme c’est la règle à cette époque pour les événements marquants de la vie locale, les photographes sont à I’ouvrage pour le compte des éditeurs de cartes postales. La carte que nous présentons ici a été utilisée par un soldat donnant de ses nouvelles à un  » cher copain  » de Fréjus le 26 octobre 1915. Elle nous donne une image de l’évacuation prise le 18 août 1914 en gare de Giromagny.
Sur les murs de la gare on remarquera les affiches de la mobilisation et la déclaration de guerre en train de se décoller. Il n’est pas possible de déterminer s’il s’agit de Belfortains ou d’évacués venant de villages du Sundgau. La foule comprend essentiellement des femmes et des enfants.
Les enfants posent au premier rang, derrière eux, des femmes, sans prendre vraiment la pose, regardent I’objectif. Au centre un vieux soldat (réserviste mobilisé) est supposé, sans doute, donner une touche militaire à l’événement. A l’arrière plan, la foule se désintéresse du photographe, les visages sont calmes.
Ce type d’image est bien propre à entretenir le climat de confiance et de détermination qui prévaut en août 1914. Le caractère réellement dramatique de l’événement n’apparaît pas dans cette scène qui baigne, au contraire, dans une ambiance de calme et de tranquillité.
Les évacués reviendront chez eux individuellement à partir d’août 1915 et collectivement à partir de décembre 1915, à la fin de l’état de siège.

À lire : Vacelet (Marie-Antoinette), Le Territoire de Belfort dans la Grande guerre 1914-1918, Archives Départementales, 1984.

J’étais enfant à Auxelles-Bas pendant la Grande guerre

Si mes premiers souvenirs réels de Ia Grande guerre ne datent que de 1918, ma prime enfance a été tellement imprégnée de l’atmosphère de ce ternps et abreuvée de récits sans cesse ressassés que je puis témoigner de faits antérieurs.

Ce fut d’abord le passage dans le village des réfugiés de Seppois. Les deux villages de Seppois, situés aux confins de I’Alsace et du Territoire, avaient été parmi les premiers à être libérés dès le mois d’août 1914. Aussitôt, les autorités militaires avaient décidé d’évacuer les habitants de ces deux villages. Ils furent jetés sur les chemins de I’exil selon un itinéraire incertain, à l’écart des routes principales réservées à l’armée, en quête d’une gare non saturée par les besoins militaires, vers une destination non encore précisée. Les habitants d’Auxelles, bien que déconcertés par la façon de s’exprimer de ces réfugiés, se multipliaient pour adoucir leur sort, mais ne purent rien contre leur grand désarroi et leur extrême désespoir.
Après cette expérience ma mère me répétait : « Quoi qu’il arrive, jamais nous ne quitterons notre maison ! »
Un jour de 1915, mon frère aîné, alors âgé de quinze ans, et quelques uns de ses camarades partirent à bicyclette pour porter une couronne rustique sur les lieux, à Petit-Croix, où avait été abattu en combat aérien, I’as de I’aviation Adolphe Pégoud. Il en avait rapporté un morceau de tube en cuivre, qui fut conservé comme une relique.
Qui se souvient encore de Pégoud, pionnier de I’aviation qui, en 1913, réalisa le premier looping et le premier saut en parachute et qui, dès le début de la guerre, remporta de nombreuses victoires dans des combats aériens au cours desquels les pilotes tentaient de s’entre-tuer au moyen de fusil de chasse ? Et cette bande de jeunes qui s’en allaient de nuit, à l’aide de pioches aux manches raccourcis, fouiller la butte de tir de Giromagny pour déterrer des débris de cuivre et d’étain, qui, revendus à un récupérateur, apportaient quelques sous à la maison. L’expédition n’était pas sans risques : certain soir ne faillirent-ils pas être pris sous le feu d’un exercice de tir de nuit ?
Il me semble voir encore ma mère tressaillir quand des explosions lointaines faisaient vibrer les vitres et trembler les portes de notre maison : « Et les pauvres gens qui sont dessous ! »
Je crois encore sentir sous mes doigts la belle image (peut-être un simple Bon du Trésor) donnée à ma mère qui avait remis au percepteur les deux pièces d’or qu’elle avait fait bénir, avec les alliances, le jour de son mariage. Il y avait aussi une carte postale où figurait une grosse pièce d’or, d’où jaillissait un coq gaulois, en or lui aussi, hérissé de colère contre un soldat allemand qui reculait terrifié : « Pour la Victoire, donnez votre or ! »
Plus émouvant encore, le mot d’encouragement manuscrit, signé Poincaré, adressé à ma mère qui, comme d’autres épouses de mobilisés, avait adressé une supplique au Président de la République. Etait joint à la lettre un beau billet bleu tout neuf… qui ne fut jamais dépensé. Et pourtant, la vie était dure : outre les journées de ma mère, c’est le salaire de mon frère aîné, né en 1900, qui faisait vivre la nichée. En 1914, il travaillait comme terrassier au fort de Giromagny.
Et cette attente, cette angoisse permanente ! Ce rideau soulevé pour suivre la marche du maire et du curé, et ce grand soupir de soulagement égoïste quand leur progression dépassait la cour de la maison… et puis les cris de bête blessée quelques maisons plus loin… cris qui se reproduisirent vingt six fois durant cette Guerre.
Des troupes venaient souvent au repos au village. Un jeune artiste suisse engagé dans la Légion pour la durée de la guerre, tombé gravement malade, fut soigné à la maison comme
un enfant de la famille. En reconnaissance, il avait fait au crayon des croquis de notre maison et de tous les membres de la famille.

(La suite dans : J’étais enfant à Auxelles-Bas pendant la Grande guerre, par Jules-Paul Sarazin, page 7)

L’escadrille C 34 de Romagny-sous-Rougemont

Au début de I’année 1915, seules 21 escadrilles de 6 appareils chacune, composent l’aviation militaire française. Parmi elles, l’escadrille C34 créée Ie 6 février 1915 et commandée par le capitaine Lefort.
C34, avec un C comme Caudron, avions qui la composent. Cette escadrille sera basée à Romagny-sous-Rougemont et plus particulièrement préposée à Ia surveillance des lignes du front d’Alsace et ou réglage des tirs d’artillerie.

Une arme nouvelle

Jusqu’alors, on se battait sur terre et sur mer. La guerre moderne se devait d’étendre son champ de dévastation. A partir de 1915 on va se battre aussi dans I’espace illimité des airs. L’avion devient une arme à part entière et démontre quotidiennement tout son potentiel. ll devient indispensable. Au début des hostilités, pas moins d’une quinzaine de types d’avions différents équipe I’aviation française. C’est  » une flottille d’échantillons  » (L’illustration) qui va se réduire à quatre ou cinq types principaux au début 1916.
Pour servir cette nouvelle arme, il n’est pas difficile de recruter les hommes. Beaucoup de ceux qui vivent une inaction déprimante comme sous-officiers ou jeunes officiers dans une cavalerie en voie de disparition sont candidats. On recrute également de jeunes artilleurs qui ont déjà assimilé les techniques du réglage de tir et aussi des fantassins blessés, par{ois proposés à la réforme, mais qui veulent continuer à offrir leur service à la Mère Patrie. Il faut des pilotes et des observateurs assez forts, assez téméraires, assez instruits aussi, pour assimiler rapidement plusieurs techniques.
Après un stage rapide dans une école à l’enseignement sommaire, chacun rejoint une escadrille, la plupart du temps inconnue ; à Romagny par exemple…

Dans des caisses

Le mercredi 10 février 1915, les habitants de Romagny regardent avec curiosité, les grosses caisses qui sont déchargées du  » tramway  » et qui sont acheminées vers les grandes
prairies situées à droite de l’étang des Fosses (entre les villages de Petitefontaine et de Felon). Comme le stipule le télégramme du GQG (voir illustration) ces caisses contiennent (entre autres) les avions en pièces détachées. ll s’agit de Caudron type Glll, biplan équipé d’un moteur de 90 CV pouvant atteindre une vitesse de 115 km/h et un plafond de 3000 mètres.
Rapidement les prairies vont prendre I’allure d’un vrai terrain d’aviation. Des hangars Bessonneau et des baraques sont érigés, un bar d’escadrille est aménagé… Les missions d’observation et de réglage de tir se succèdent. Le 4 novembre 1915, I’escadrille participe à une mission spéciale en compagnie des avions stationnés à Belfort et Chavannes : le bombardement des usines de gaz asphyxiants Roessler vers Dornach. Le lendemain 5 novembre, les avions quittent provisoirement le terrain de Romagny : « Les terroins de Romagny et de Chavannes, acceptables pendant la belle saison, vont devenir fangeux en hiver. En conséquence, à la date du 5 novembre, le stationnement sera modifié. Les aviateurs de Romagny, attachés au service de la 66ème Division d’lnfanterie, sont ainsi répartis entre l’escadrille de Belfort et l’escadrille de chasse de Fontaine.
Il est probable que la C34 soit revenue à Romagny dès le retour des beaux jours, hélas aucune date ne nous confirme ce retour printanier. Le 23 septembre 1916, les journaux de marche de la 157ème Division d’lnfanterie signalent la perte de trois appareils aux environs de Thann et de Traubach-le-Haut mais leur escadrille d’origine n’est pas précisée.
Cependant il est mentionné que le deuxième appareil concerné s’est écrasé en flammes à 11h10 à’ l’ouest de la route de Thann et que les deux aviateurs ont péri carbonisés. La présence de deux hommes à bord signifie donc qu’il s’agit d’un appareil d’observation appartenant peut-être à I’escadrille de Romagny (les avions de chasse étant alors des monoplaces de type Spad).

Une hiérarchie malmenée

La bataille du ciel prend chaque jour un peu plus d’importance. On forme désormais un pilote en cinquante jours (l’élève qui n’a pas obtenu son brevet au bout de trois mois est reconnu définitivement inapte et renvoyé). Les accidents sont nombreux et pas toujours causés par l’ennemi. Ils sont bien souvent aussi la conséquence d’imprudences voire de forfanteries. A Romagny, un pilote nommé Jeannin est connu pour ses frasques. Un jour, en plein midi, alors que tout est calme, un avion allemand surgit au ras des arbres et mitraille par deux fois les avions basés sur le terrain. Jeannin saute dans son avion, décolle et fonce en direction de I’Alsace. 
Il n’a reçu aucun ordre et n’a obéi qu’à son tempérament impulsif et téméraire.
Quand il revient quelques temps plus tard, il est poursuivi par deux chasseurs ennemis qui le mitraillent, sans I’atteindre heureusement. La batterie de DCA de Romagny, très vite en action, met en fuite les poursuivants. Jeannin en est quitte pour une sévère remontrance du chef d’escadrille qui a bien cru que ses avions allaient être détruits.
Cette anecdote met bien en évidence le légendaire relâchement de la discipline dans l’aviation. Plus encore qu’à bord d’un bateau naviguant sur les mers lointaines, la hiérarchie s’estompe dans les airs. Cette camaraderie est d’ailleurs confortée par le règlement :  » Quel que soit le grade de I’observateur, le pilote est le seul maître à bord, après les événements…  » C’est ainsi qu’un officier observateur, lieutenant ou capitaine, voit son autorité subordonnée à celle d’un pilote simple soldat ! C’est peut-être cette attitude si différente qui rend alors les aviateurs aussi sympathiques…

Triste veillée de Noël

Le dimanche 24 décembre 1916, deux aviateurs de Romagny sont descendus en flammes à Aspach-le-Haut. Il s’agit du sous-lieutenant observateur Louis Lombart, âgé de 31 ans et de son jeune pilote, le maréchal-des-logis Jean Hourcade. Ils seront tous deux inhumés au cimetière de Rougemont, le mardi 26 décembre 1916. On notera au passage qu’il n’est plus question en 1916 de déménager l’escadrille pour la durée de I’hiver.
Le 23 janvier 1917, par un froid sibérien, le général Nivelle (nouveau commandant en chef des Armées du nord et du nord-est) accompagné du général Debeney, procède à une remise de décorations sur le terrain de Romagny.
A la mi-février 1917, la C34 reçoit des Nieuport 24 bis. Un incident émaille cette « livraison » : un des premiers pilotes devant arriver à Romagny se perd, se retrouve en zone ennernie, se fait mitrailler et chute côté français dans un étang, à Sentheim…

Une lutte déséquilibrée

Les avions d’observation sont…

(La suite dans : L’escadrille C 34 de Romagny-sous-Rougemont, par François Sellier, page 9)

Joffre à Giromagny

Le 14 novembre 1915, le général Joffre alors commandant en chef des armées françaises est de passage à Giromagny…

Les prises d’armes, défilés, remises de décorations étaient des cérémonies prisées des populations. Sans doute moins des soldats eux-mêmes. Elles permettaient à la nation de voir I’armée sous un jour favorable et la confortait dans la volonté de tenir et d’être un jour victorieuse. Les photos présentées ici portent la mention suivante : « Le général Joffre en Alsace, une remise de décorations à Giromagny ». Nous sommes le 14 novembre 1915, le sol est recouvert d’une mince couche de neige. Le général Joffre, en dolman sombre, décore de la Croix de guerre les drapeaux des régiments qui se sont battus glorieusement en Champagne et des officiers et sous-officiers (alignés au premier rang sur la première photo). Les soldats
portent tous la tenue bleu-horizon généralisée dans l’été l9l5 et le casque Adrian.
Auparavant, Joffre était à Belfort. Voici le récit de sa visite que nous fait Louis Herbelin dans ses  » Ephémérides belfortaines de la guerre 19l4-1918  » :
« Le général Joffre est arrivé ce matin à Belfort par train spécial. ll a débarqué au quai militaire où l’attendait le général de Villaret, commandant la Vllè armée, avec les officiers généraux de la Place et leurs états-majors. Les honneurs lui ont été rendus par un piquet de troupes. Aussitôt après les salutations, il s’est rendu en automobile à la caserne Béchaud où venaient d’arriver successivement, musiques en tête et drapeaux déployés, quatre régiments d’infanterie. Après avoir passé ces troupes en revue, le généralissime a décoré plusieurs offciers, parmi lesquels le médecin principal Reboud, nommé officier de la légion d’honneur et le major Perruchet, fait chevalier.
L’après-midi, le général Joffre s’est rendu à Frahier où il a passé une inspection de diverses unités du 14ème Corps cantonnées dans ce village. »
Et à Giromagny donc…

Les visites du président

Chaussé de gros godillots surmontés de leggings, tunique à dolmon, casquette à visière plate, Raymond Poincaré se rend sur tous les fronts durant la guerre. Lorrain d’origine, il est né à Bar-le-Duc. Le Président de Ia République vient à plusieurs reprises visiter les fronts d’Alsace et des Vosges en 1915 et 1916 et traverse ainsi le Pays sous-vosgien.

12 février 1915 
Arrivé dans la matinée à Belfort en provenance d’Epinal, le Président de la République accompagné du ministre de la guerre M. Millerand gagne l’Alsace par Chavannes-sur-l’Etang et visite Montreux-Vieux, Dannemarie, Masevaux puis Niederbrück où il décore un industriel. Prévenue incidemment de son passage, la population rougemontoise pavoise quelques maisons en I’honneur du Chef de I’Etat et attend. Hélas M. Poincaré a du retard, beaucoup de retard : « Ce n’est que vers 18h30, alors qu’il fait nuit noire et que les rues sont presgue désertes que I’automobile présidentielle, suivie de plusieurs autres, traversa le village… »
Le Chef de l’Etat repart le soir même de Belfort pour présider le Conseil des ministres du lendemain.

9 août 1915
Après avoir passé la nuit à Létraye (Vosges), M. Poincaré accompagné de l’écrivain Pierre Loti et du général Duparge, traverse la vallée de la Thur d’Urbès à Bitschwiller, pour gagner Masevaux » par une voie nouvelle, qui se dissimule derrière les côtes et qui pourra devenir plus tard une très belle route de tourisme » (Cette route qui vient d’être construite par le Génie n’est pas encore appelée route Joffre). Le Président se rend ensuite à Lachapelle-sous-Rougemont puis à Rougemont-le-Château où les honneurs lui sont rendus devant I’Hôtel du Raisin. Il échange quelques mots avec les officiers de l’état-major avant de regagner Belfort où il arrive à 17h30.

13 décembre 1915
Il est 8h30. Près de 15000 hommes de la division marocaine commandée par le général Couderet sont alignés dans les prairies au nord-est de Chaux. Le Président Poincaré accompagné de M. Millerand, des généraux de Maud’huy commandant la Vllè armée, Demange gouverneur de la Place de Belfort, Chatelain commandant la région fortifiée de Belfort, passe les troupes en revue et remet leurs drapeaux aux régiments composant la division. La division marocaine s’est particulièrement distinguée lors de la bataille de la Marne en septembre 1914, dans les zones inondées de Nieuport en janvier 1915 et au cours de la bataille d’Arras en mai-juin 1915. A n’en pas douter le village de Chaux connaît là, la plus grande prise  d’armes que le Pays-sous-vosgien ait connu.

24 janvier 1916
Parti le matin de Bussang, M. Poincaré descend la vallée de la Thür et gagne Masevaux par la nouvelle route du Hundsrück qu’il emprunte pour la deuxième fois. MM Dubost président du Sénat, Deschanel président de la Chambre des députés et le général de Villaret, I’accompagnent. Ils sont accueillis à Masevaux par le général Varin et Messimy, ancien ministre de la guerre et alors lieutenant-colonel commandant la 213è brigade d’infanterie. Le Chef de I’Etat se rend ensuite à Rougemont-le-Château où il déjeune au château Erhard, siège du QG du général Varin, commandant la 2èdivision de cavalerie. Pendant tout le repas, les musiciens du 11ème dragons jouent sous les fenêtres de la salle à manger. A la sortie des personnalités, aux environs de 14 heures, tous les ouvriers de I’usine Erhard sont alignés près du château et les filles du directeur M. Datt, offrent une gerbe de fleurs au Président. En récompense, l’une reçoit une croix de Lorraine, I’autre une broche en or. Il fait déjà nuit lorsque vers 18h30, M. Poincaré traverse Belfort dans la plus grande…

(La suite dans : Les visites du président, par François Sellier, page 18)

Les écoles de Valdoie pendant la Grande guerre

Les instituteurs mobilisés : l’un trouve la mort, l’autre est grièvement blessé.

En août 1914, lorsqu’ éclate le premier conflit mondial, parmi les cinq enseignants de l’école de garçons de Valdoie (Pierre Merlet, directeur, Gustave Dominique, Georges Gouc, Jules Frahier et Emile Hosatte) deux vont rejoindre immédiatement leur unité : G. Gouc et E. Hosatte. Le directeur a dépassé l’âge limite pour être mobilisé, les deux autres maîtres sont réformés, ils resteront donc à Valdoie.
L’état-major, pensant que Belfort aurait à nouveau un rôle capital à jouer pendant le conflit, fait évacuer dès les premiers jours de guerre la plupart des enfants du Valdoie qui trouvent refuge dans Ie Jura (secteur d’Arbois, Mouchard, Poligny). ll n’y a donc pas de rentrée scolaire en octobre 1914 ; les locaux de I’Ecole de garçons sont déjà occupés par I’armée, ceux de l’Ecole des filles par un service ambulancier. Dans la maternelle, les militaires ont installé un poste de garde-voies et le téléphone de campagne.
Lorsque le front se stabilise en Alsace début 1915, on comprend enfin que Belfort n’aura probablement aucun rôle stratégique à jouer, aussi dès février de nombreuses familles peuvent-elles regagner leur domicile. Les locaux scolaires sont alors en partie libérés à la demande de la municipalité. Les classes reprennent dès la Toussaint l9l5 avec seulement trois instituteurs et ce pour toute la durée du conflit.
Les paysans et les instituteurs sont issus des couches sociales qui, au cours de cette terrible guerre, laissèrent le plus de morts sur les champs de batailles.
Le « Livre d’or du personnel mobilisé » paru dans les colonnes des Bulletins de I’lnstruction publique 1915- 1918 relate ainsi la mort au champ d’honneur de l’un des deux instituteurs et la mise hors de combat de l’autre.
« M. Hosatte Emile, instituteur à Valdoie, sous-lieutenant de réserve, a été nommé chevalier de la Légion d’honneur, pour prendre rang du 29 août 1915, par arrêté ministériel du 18 septembre 1915. Chef de section remarquable, très brave au feu. A brillamment entraîné sa section à l’assaut d’un barrage ennemi, l’a organisé et défendu malgré une première blessure, a repoussé plusieurs contre-attaques et a été blessé grièvement au cours de la dernière, perte d’un oeil. Décédé le 1er septembre 1915 ».
« Le sergent Gouc Georges, instituteur à Valdoie, a été blessé le 12 septembre 1916 sur la Somme, par un éclat d’obus qui traversa les deux cuisses avec section de I’artère fémorale gauche, est amputé le 9 novembre de la jambe gauche à la suite d’une forte hémorragie. Il est actuellement en traitement à l’hôpital américain de Neuilly (Oise). A été décoré de la Médaille militaire et de la Croix de guerre avec palme le 2 octobre. Il a été I’objet de la citation suivante : « sous-officier très consciencieux, agent de liaison près de son chef de bataillon, a fait preuve pendant plusieurs jours de combats d’un grand courage en transmettant les ordres sous les plus violents bombardements, grièvement blessé au cours d’une mission. »
Pour perpétuer la mémoire des instituteurs tombés au champ d’honneur, des plaques commémoratives furent apposées dans les classes où ils avaient enseigné. La plaque d’Emile Hosatte fut inaugurée le 20 juillet 1919 en présence des autorités municipales et du corps enseignant. Elle fut placée dans la classe du cours préparatoire (conciergerie actuelle) où il exerça de 1912 à 1914. Lors de I’agrandissement de 1930 on la relégua dans la salle du rez de chaussée de l’aile gauche. Chaque année encore, et ceci sans interruption depuis 1945, le ll novembre, la municipalité, le directeur d’école et une délégation d’élèves viennent y déposer une gerbe offerte par la coopérative scolaire.

L’école normale transférée à Valdoie

Créée à Belfort en 1881, elle fonctionne jusqu’à la fin du siècle dans les locaux de I’Ecole des bourgeois, puis rue Voltaire. De février à octobre 1916, elle doit s’installer provisoirement à
Valdoie hors de la zone dangereuse des bombardements de la grosse pièce allemande à longue portée, en batterie à Illfurth.

(La suite dans : Les écoles de Valdoie pendant la Grande guerre, par François Liebelin, page 22)

Un certain 7 novembre 1918

Le lieutenant Edouard Hengy de Belfort et Pierre Chrétien de Rougemont-le-Chôteou étaient Ià ce 7 novembre 1918. Le coporal-clairon Pierre Sellier de Beaucourt était là aussi, mais lui entrera dons I’Histoire. Là ? C’est tout près de la cote 232, entre La Capelle et Haudroy.
Récit d’une journée tant attendue.

Le jeudi 7 novembre 1918, au petit matin, la 3ème Compagnie du 1er Bataillon du 171ème Régiment d’lnfanterie de Belfort (commandée par le lieutenant Hengy), marche par Haudroy sur la route de la Capelle. Pierre Chrétien de Rougemont appartient à cette Compagnie :
« On marchait en colonne de chaque côté de la route, on avait reçu l’ordre de ne pas tirer. Devant nous il y avait le capitoine (capitaine Lhuilier ? ) et un autre officier qui marchaient en discutant. lls avaient I’air tout joyeux, je me disais » il doit y avoir quelque chose ! « Moi j’étais juste derrière eux, en tête de section. Quand I’autre officier est parti, j »ai dit au capitaine » il y a quelque chose de bon là ?  » Il m’a dit « T’as pas entendu ? Oui c’est les parlementaires allemands qui doivent venir ici, il faudra tous vous mettre dons le fossé pour les laisser passer. « J’ai répondu  » Oh, s’il n’y a que ça, on veut bien le faire… »
Mais les plénipotentiaires allemands ont du retard, beaucoup de retard. La nuit est maintenant tombée, brumeuse ; il pleut, il fait froid.
« Vers 20h10, une lumière apparaît à l’horizon et approche lentement, c’est l’alerte ! Chef de bataillon, caporal-clairon etc… sont là ; à 200 mètres ils voient surgir avec une émotion non dissimulée la voiture de tête des plénipotentiaires. Immense dons la nuit, flotte le drapeau blanc, et le maréchal des logis chef Arthur Zobrowski du 2ème Uhlans, debout sur le marchepied, lance les sonneries d’appel pour demander libre passage à travers les lignes françaises ; il est exactement 20h20.
Le convoi allemand comprend cinq voitures ; c’est l’instant pathétique émouvant où le capitaine Lhuillier prend place dans la voiture de tête, appelle le caporal-clairon Pierre Sellier et lui donne l’ordre de sonner de pied ferme et pour la première fois le  » Cessez-le-feu ».
Puis, montant sur le marchepied de la première voiture, Sellier sonne le « garde à vous » et les refrains des unités de la 166è Division d’lnfanterie (171è Rl, 19è et 26è BCP). Quelques instants plus tard, il monte s’asseoir dans cette voiture, tenant d’une main son clairon et avec I’autre étreint la hampe du drapeau blanc allemand »
Les poilus du 171, mouillés, boueux, contemplent la scène en silence. Ils ont trop souffert de ces quatre années de guerre pour manifester un quelconque sentiment.
Le cessez-le-feu est bel et bien sonné, mais la France profonde ne le sait pas encore. A Belfort, vers 21h30, un avion allemand vient d’ailleurs semer le trouble en jetant sur la Place des tracts ayant pour titre « La terreur militaire en France »…

(La suite dans : Un certain 7 novembre 1918, par François Sellier, page 22)

Un lieu de mémoire, le monument aux morts d’Etueffont

Après la guerre de 1870-1871,pour rappeler le souvenir des victimes des combats, un certoin nombre de monuments avaient été à I’initiatiye d’associations comme le « Souvenir Français » ou même de particuliers. Après la Grande guerre le phénomène est d’une toute autre ampleur. Pour exalter Ie sacrifice des disparus et donner une leçon aux survivants la quasi totalité des communes françaises érigent un monument aux rnorts. Pour les sculpteurs et marbriers c’est le marché du siècle.

Dès 1919, Etueffont-Haut décide d’ériger un monument aux morts de la guerre de 1914-1918. Le monument sera dédié aux morts d’Etueffont-Haut mais aussi à ceux d’Etueffont-Bas, de
Lamadeleine et de Petitmagny, communes qui traditionnellement dépendent de leur voisine pour le cimetière et l’église.

Un consensus nouveau

Les municipalités ont l’initiative du projet et les populations, comme partout ailleurs, sont invitées à y participer en apportant leur soutien financier. La collecte des fonds est confiée à un Comité qui se met en place fin 1919-début 1920. Le maire d’Etueffont-Haut, Monnier en est le président, l’instituteur Dietermann le secrétaire et le curé Lacreuse, le trésorier. A leur côté figurent six représentants des familles des morts, sept soldats démobilisés (dont l’abbé Tavernier), deux conseillers municipaux et deux dames quêteuses.
L’initiative de la souscription est privée mais la municipalité est largement représentée au Comité. Par ailleurs, la composition du bureau témoigne du consensus politique nouveau issu de la guerre : le maire, l’instituteur et le curé siègent côte à côte et oeuvrent en plein accord.
L’exemple d’Etueffont n’est d’ailleurs pas isolé. La guerre a mis un terme, ou au moins, considérablement atténué les antagonismes nés de la loi de séparation des Eglises et de I’Etat.
Immédiatement, le Comité se met à I’oeuvre et collecte des fonds. Dans les quatre villages, pour une population totale de 1587 personnes en 1921, les souscripteurs sont au nombre de 459. Si on considère que chaque don est fait au nom d’une famille, c’est la presque totalité des habitants qui apporte son obole. La somme collectée s’élève à 13 400 F soit une moyenne de 8,5 F par habitant qui cache de grandes disparités. Certains dons sont plus que modestes (deux dons de 0,50 et 0,20F), d’autres sont symboliques tel celui des quatre vingt cinq enfants de l’école d’Etueffont-Haut qui versent chacun 1 F, d’autres sont importants (huit dons vont de 200 à 300 F). Enfin, la famille Zeller qui possède les usines textiles d’Etueffont-Bas et Haut, marque sa place dans la société locale en donnant 1000 F et 2000 F au titre de Zeller frères et Cie.
Il apparaît bien vite que cette somme pour être importante, sera insuffisante. Aussi de nouvelles sous-criptions sont organisées en 1922 mais le nombre des donateurs décroît de même que leur générosité. A Etueffont-Haut la première souscription avait touchée 266 personnes pour 6 043,5 F la seconde 214 pour 2154,5 E la troisième 135 personnes pour 547 F. Au total, dans les quatre villages 18 800 F sont collectés (tout près de 12 F par habitant).

L’embarras du choix

Dans le même temps où les quêteuses sont à l’ouvrage, la municipalité envisage les modalités concrètes de l’érection.
Où ériger le monument ? L’historienne Annette Becker écrit : « L’espace réservé au monument est sacralisé, il faut le choisir au mieux. Quelle place, quelle rue, a été jugée suffisamment au coeur (au double sens du mot) de la commune ? ».
Le monument est le plus souvent conçu pour marquer le paysage urbain. À Etueffont, le choix de l’emplacement n’a semble t-il pas posé de problème. Le long de la rampe d’accès à l’église et au cimetière, il sera effectivement bien en vue et au…

(La suite dans : Un lieu de mémoire, le monument aux morts d’Etueffont, par Philippe Dattler, page 26)

 

Rodolphe Sommer (roman) 12 – Le crime de Vaudrey

Les forêts de Vaudrey, et en particulier celles de I’industriel Rodolphe Sommer, sont giboyeuses. La tentation du braconnage est grande et le travail des garde-chasse parfois… dangereuse.

Vers neuf heures du matin la nouvelle se répandit en ville. Julien Knittel, garde particulier des domaines de M. Sommer, n’était pas rentré à son domlcile, la veille au soir. ll était parti vers deux heures de I’après midi comme à I’accoutumée. ll avait dit à sa femme, qu’il comptait se rendre au Haut-Plateau d’abord, aux Charmettes ensuite, pour rentrer en contournant le Mont-Roulé. Cela faisait un long parcours pour un homme de son âge. Peut-être avait-il fait une chute et s’était-il blessé ? ll convenait donc d’entreprendre sans retard des recherches, en suivant I’itinéraire qu’il avait lui-même indiqué.
La gendarmerie et la police de Vaudrey se mirent en route, avec une civière, accompagnées de volontaires. En tout, une cinquantaine de personnes au moins entreprirent les recherches. Cela devait permettre d’étendre le champ des investigations en dehors des sentiers battus.
Durant toute la journée, le Haut-Valmont, les Charmettes et le Mont-Roulé furent explorés en tout sens, sans résultat aucun. Le parquet fut alors saisi : il ordonna d’étendre les investigations à tout le domaine de M. Sommer. Le maire fit publier à son de caisse que celles-ci seraient reprises et amplifiées le lendemain.
Les volontaires qui désiraient y participer étaient priés d’unir leurs efforts à ceux de la police locale. Un plan d’investigations établi par le commissaire de police permettrait le ratissage de tout le ban de Vaudrey.Deux chiens policiers renommés pour leur flair et venus de Dljon, seraient également de I’expédition avec leurs maîtres. Bref, toutes les dispositions étaient prises pour mener les recherches à bonne fin, avec un minimum de temps.

Toute la région montagneuse qui formait l’écrin de la petite ville de Vaudrey fut, selon I’expression du journal local, inutilement explorées dans ses moindres replis, abris naturels ou artificiels. Deux mille hectares furent parcourus en tous sens par cinquante hommes.
« Aucune trace du garde disparu ne put être relevée. Tous les efforts conjugués en vue de retrouver son corps se soldaient par un échec », constata le commissaire de police de Vaudrey.
C’est alors que I’enquête s’orienta dans une autre direction. ll devait s’agir, non d’un accident, mais d’un crime, affirmait-on à présent. S’il y avait eu accident, le malheureux garde-chasse eut été retrouvé, mort ou vif. Du fait qu’il avait disparu sans laisser la moindre trace, il fallait conclure qu’il y avait eu meurtre et que le corps avait été enfoui ensuite, ou précipité dans quelque étang du voisinage. Cette dernière hypothèse impliquait la participation au crime de plusieurs individus, car Julien Knittel étant un homme de grande taille et d’une certaine corpulence, il s’ensuivait qu’un seul individu n’eût pu le transporter du lieu du meurtre jusqu’à l’étang le plus proche.
La police mobile de Dijon avait été saisie de I’affaire, la presse parisienne s’en était emparée. La police de Vaudrey collaborait. Elle fournit aux envoyés de Dijon la liste des individus suspects. Sur cette liste figuraient tous les noms des braconniers connus.
La police mobile de Dijon se montra aussitôt soupçonneuse et expéditive. En possession de la liste, elle commença par convoquer Just Travers au commissariat de Vaudrey. Celui-ci avait lieu de se montrer inquiet, puisqu’il avait braconné au cours de l’après-midi du crime et qu’une bonne partie de l’itinéraire qu’il avait suivi coïncidait avec celui du garde-chasse. Aussi, son premier réflexe, au reçu de la convocation, fut-il de se précipiter à « la Cigogne ».
– Voyez ce qui m’arrive, dit-il en présentant le papier au patron ?
– Eh bien ? Que veux-tu que j’y fasse ?
– Je voudrais que vous disiez, si I’on vous interrogeait, que j’ai façonné du bois chez vous, durant toute la journée de lundi dernier.
– Je dirai que tu n’as travaillé chez moi que le matin, ce qui correspond à la vérité.
– S’il en est ainsi, je dirai, moi, que vous m’avez chargé de braconner pour vous.Vous ne pouvez nier que…

(La suite dans : Rodolphe Sommer – Le crime de Vaudrey, par Pierre Haas, page 29)

À propos de deux objets trouvés lors des fouilles du vieux château de Rougemont

La carrière du livre de Pierre Walter consacré aux fouilles du Vieux Château de Rougemont (paru en 1984) poursuit son petit bonhomme de chemin en suscitant observations, remarques ou précisions. Ainsi Monsieur Jacques Labrot, responsable du Centre National de Recherches sur les Jetons et les Mereaux du Moyen-Age a fait part d’intéressantes remarques à propos de deux objets mis au jour au cours des fouilles : une balance et un mereau.

Le mereau à compte

Le mereau est une sorte de jeton ayant de multiples usages au Moyen – Age. Il permettait, par exemple, de justifier qu’une taxe avait bien été payée (dans ce cas, c’est une sorte de reçu). Le mereau à compte est un jeton utilisé pour effectuer des opérations comptables ou de change sans qu’il soit besoin de manier les pièces d’or ou d’argent toujours très fragiles. Ces mereaux reproduisent les monnaies qu’ils sont censés représenter.
Le mereau trouvé à Rougemont est une petite pièce de cuivre d’un poids de 0,8 grammes et de 22 millimètres de diamètre. A l’avers il présente une croix fleurdelisée et au revers un écu a six fleurs de lys.
« Le type de l’avers, anépigraphe, peut se situer dans la première moitié du XVè siècle. Il s’agit au départ d’un type réalisé pour la chambre des comptes royale et pour l’usage de ses employés. Le type du dessin de revers constitue une variante de décor qui n’était pas encore répertoriée. La question se pose de sa présence sur ce site. Un officier de la chambre des comptes royale est-il venu au château, et si oui dans quel but ? Dans la négative, faudroit-il envisager que ce type de jeton, banalisé dans sa fabrication por un atelier monétaire, comme
celui de Tournoi, ait en fait été fabriqué plus sommairement en grand et vendu à la population pour un usage plus courant?

La balance

Ce type de petite balance était utilisé par deux professions : les changeurs et négociants maniant des monnaies (banquiers, hommes d’affaires et aussi orfèvres), les apothicaires qui devaient peser les quantités de poudres nécessaires à leurs préparations (on notera dans la même optique, la présence sur le site d’un mortier, ayant pu servir à broyer en poudre divers ingrédients, soit en cuisine, soit en pharmacopée). Dans les deux hypothèses d’un instrument professionnel, sa présence en ces lieux est d’autant plus insolite que…

(La suite dans : À propos de deux objets trouvés lors des fouilles du vieux château de Rougemont, par Jacques Labrot, page 29)

Ce numéro de La Vôge est épuisé.

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