Table des matières
Le vieux pont de Valdoie |
François Liebelin |
2 |
La construction du nouveau pont de Valdoie |
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4 |
Patronymes d’origine allemande à Auxelles et dans la région |
Jules-Paul Sarazin |
6 |
L’amicale société de gymnastique de Giromagny |
Jean Demenus |
9 |
Les tribulations d’une mémoire qui ne voulait pas disparaître… |
Colette Haas-Braun |
13 |
Il y a 100 ans |
François Sellier |
17 |
L’école de Menoncourt |
Pierre Cuenat |
21 |
Rodolphe Sommer (roman) 2 – Le syndicat |
Pierre Haas |
23 |
MAGAZINE |
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Les fontaines de Giromagny |
Philippe Dattler |
30 |
Spigolatura |
Galileo Loesch |
31 |
L’église de Chaux |
Philippe Dattler |
33 |
Partie de canotage au Malsaucy |
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34 |
Le vieux pont de Valdoie (pont Carnot)
La construction d’un pont est toujours vécue comme un évènement exceptionnel dans la vie d’une petite cité, à Valdoie peut-être plus qu’ailleurs puisque l’origine du village est intimement liée à la rivière.
Le passage du val d’Oye
Le val d’Oye, c’est le passage obligé, le gué où l’on franchissait la rivière l’Oye, devenue plus tard la Savoureuse. Le Coutumier du Rosemont, rédigé probablement au début du XVIe siècle, cite pour la limite sud de la seigneurie, le grand pont du Valdoie.
Jusqu’à 1750, la route royale reliant Belfort à Paris passe par le pont de Valdoie, via Sermamagny-Lachapelle, le relais de diligence se trouvant à Auxelles-Bas. Le déclassement de cette voie intervint au moment même où est créée la nouvelle route du Ballon d’Alsace reliant Lepuix à Saint-Maurice sur Moselle. Dès 1760, elle amène le sel de Lorraine à la citadelle de Belfort et aux villes voisines, Giromagny, Porrentruy.
Dès la création de l’administration des Ponts et Chaussées d’Alsace, de gros travaux sont entrepris pour endiguer le lit de la Savoureuse au val d’Oye où elle déborde à chaque crue. En 1741,le pont de bois de Valdoie est refait à neuf. Ses fondations sont constituées par des pieux enfoncés dans les alluvions. Les crues fréquentes
exigent de fréquentes et coûteuses réparations, si bien qu’en 1761, I’ingénieur des Ponts et Chaussées d’Alsace, de Clinchamp, celui-là même qui avait fait édifier la nouvelle route en lacets du Ballon d’Alsace, décide la construction d’un pont de pierre à trois arches au Valdoie. Dans l’impossibilité d’atteindre la roche en place, on se
résout à utiliser une vieille technique qui avait fait ses preuves au Moyen Age lors de la construction des cathédrales. c’est à-dire remplacer les fondations par un assemblage de poutres de chêne disposé horizontalement à environ cinquante centimètres sous le fil de l’eau.
Les travaux de ce premier pont de pierre débutèrent en 1762, se poursuivirent plusieurs années et mobilisèrent des centaines d’ouvriers. L’ouvrage, long de 32 mètres comprenait trois arches en anse de panier, les deux extrêmes de 8,80 mètres d’ouverture et celle du milieu de l0 mètres. La chaussée, longue de 9 mètres occupait toute la largeur du pont qui n’avait pas de trottoirs.
La destruction partielle du pont en 1944
Le 20 novembre 1944, un groupe blindé de l’armée allemande fait sauter le pont. Les arches des extrémités sont partiellement détruites, l’arche centrale reste intacte, mais les maçonneries de 1’édifice sont ébranlées. Le lit de la Savoureuse est encombré de pierres tombées des voûtes. Dès le 4 janvier 1945, des travaux de déblaiement du pont et du lit de la Savoureuse sont en cours. Les travaux de démolition des voûtes, piles et culées, confiées à l’entreprise Tournesac de Belfort se poursuivent jusqu’au 9 mars ; 420 m3 de matériaux divers sont retirés du lit de la rivière.
Le 2 mars 1946, l’entreprise Drouard de Paris soumissionne la reconstruction du pont. On réutilisera les fondations anciennes qui n’ont pas été touchées par le dynamitage allemand. Le pont sera rebâti en deux étapes. On démolit alors le pont de bois provisoire, la circulation pouvant se faire désormais sur le demi-ouvrage reconstruit. Le demi-pont aval est à son tour terminé six mois plus tard. L’ouvrage restauré a désormais une chaussée de 7 mètres de largeur et deux trottoirs de 1,37 mètre chacun.
L’ultime transformation du vieux pont 1980
La circulation ne cessant d’augmenter, plus de 12000 véhicules par jour dans les deux sens, un nouvel élargissement de l’ouvrage est décidé en 1979. Les trottoirs datant de 1946 sont détruits au printemps suivant et remplacés par deux autres de 1,50 mètre placés en encorbellement soutenus par deux piliers de béton placés sur les avant-becs du vieux pont. Cette dernière transformation permet la création de trois voies de circulation de 3.50 mètres chacune. Ce palliatif s’avère rapidement insuffisant pour absorber tout le trafic routier (17000 véhicules jour en 1991), d’où la nécessité de repenser complètement le plan de circulation avec pour objectif, la construction d’un nouveau pont en aval de l’ancien.
La construction du pont de Valdoie en 1762 avait nécessité :
- 1359 solives de chêne pour le « grillage » des fondations,
- 1065 m3 de maçonnerie.
- 207 m3 de maçonnerie sèche,
- 1159 m3de pierre de taille (provenant des carrières d’Offemont),
- 440 kg de fer,
- 15970 m3 de terre pour les rampes d’accès du pont.
La construction du nouveau pont de Valdoie
Une classe de CM1/CM2 de l’école André Chénier de Valdoie a suivi en 1992-1993 la construction du nouveau pont, les élèves ont rédigé un texte qui constitue un bon têmoignage sur la réalisation d’un ouvrage qui va modifier durablement le paysage et la vie locale.
C’est un ouvrage de conception tout à fait classique. Des sondages préliminaires ont montré que la roche en place se trouvait seulement à 3,40 mètres sous les alluvions.
Le pont comporte un tablier en béton armé de 60 centimètres d’épaisseur, long de 26 mètres. Ce tablier est supporté par trois poutres en béton reposant chacune sur quatre appuis en néoprène, soit au total douze appuis, huit sur les deux culées et quatre sur la pile centrale. Les culées rive droite et rive gauche sont construites différemment.
Les fondations
Les travaux ont commencé par la construction de la pile centrale. Un bull a édifié un batardeau pour isoler les fondations des eaux de la rivière qui furent déviées sur la rive gauche. La pelle a creusé dans les alluvions à plus de trois mètres de profondeur. Une grue a pu mettre en place, sur la roche, les quatre coffrages glissants à l’intérieur desquels des ouvriers creusaient au marteau piqueur pour les faire descendre jusqu’à la roche dure et former ainsi les quatre puits de fondations dans lesquels fut coulé du béton armé. Cette opération terminée, les coffrages furent retirés à la grue et l’on plaça sur les puits une semelle armée de un mètre de hauteur. Les travaux se poursuivirent par la construction de la pile centrale sur cette semelle.
La culée rive droite (rue du 11 novembre) fut construite de la même manière que la pile centrale.
Sur la rive gauche, pour ne pas détruire le mur de soutènement et les canalisations enterrées côté rue du général de Gaulle, l’entreprise procéda au forage de seize trous de quinze centimètres de diamètre, profonds de sept mètres, dans lesquels on injecta sous pression du béton armé, les seize micro-pieux servant de base aux fondations de
la culée rive gauche. Pendant la durée des travaux de fondations, deux pompes électriques, l’une de 180 m3/heure et l’autre de 260 m3 remontaient l’eau d’infiltration.
Coffrage du tablier
Les culées et piles terminées, la grue mit en place une vingtaine de grosses poutres métalliques de près de cinq tonnes chacune, supportées par des étais, ces poutrelles devaient soutenir les coffrages du tablier qui furent assemblés avec patience pendant plusieurs semaines. Ensuite, il fut procédé à l’assemblage des ferrailles qui engloutit plus de 24 tonnes d’acier. Des petits « taquets » ronds en plastique, de trois centimètres de hauteur, furent interposés entre le fer et l’acier de façon à ce que la ferraille soit complètement noyée dans le béton.
Le béton du tablier est coulé
Le vendredi 3 avril, dès 7 heures 30, il y avait une grande animation sur le chantier. En effet, il fallait dans la même journée couler les 214 m3 de béton nécessaires au tablier du pont. Une dizaine de camions tournaient en permanence depuis Bavilliers où se trouve l’usine qui fabrique le béton.
Un camion-grue spécial, supportant une énorme pipette, permettait de déverser le béton là où il le fallait. Un technicien dirigeait les opérations.
La pose des corniches
Pour terminer, nous avons assisté à la pose des corniches qui se composent d’éléments préfabriqués en usine. Ils sont assemblés au millimètre près.
La phase finale des travaux
Du 30 septembre au 29 juin, nous avons fait avec la classe quarante huit sorties sur le chantier. Nous continuerons en septembre et octobre, quand les travaux reprendront.
Après trois mois et demi d’interruption, les travaux ont repris le vendredi 16 octobre. Une entreprise a collé à chaud sur le tablier du pont, pour assurer son étanchéité, des plaques enduites de bitume. Il a fallu ensuite aménager les voies d’accès, poser les bordures de trottoirs, délimiter les passages piétons…
Le mardi matin, 2 décembre, le pont recevait son revêtement définitif : 200 tonnes d’enrobés. Quelques jours plus tard, les travaux se terminaient par la mise en place de la signalisation : bandes blanches fluorescentes sur la chaussée, feux tricolores à l’entrée et à la sortie du pont.
Enfin, le mardi 15 décembre à 14 heures 30, la veille de la mise en circulation du pont, nous assistâmes à différents contrôles techniques. Deux capteurs de déplacement avaient été placés sous le tablier, entre la pile centrale et les culées. Ils étaient reliés à un ordinateur qui permettait de suivre le déplacement vertical de l’ouvrage. Quatre poids lourds de 26 tonnes chacun, soit au total 104 tonnes placés entre la culée rive droite et la pile centrale firent fléchir le pont de 1,5 millimètre ! Les essais furent concluants. Depuis le 16 décembre, près de 8000 véhicules passent chaque jour sur le nouvel ouvrage.
Patronymes d’origine allemande à Auxelles et dans la région
Comme on l’a vu dans le dernier numéro de La Vôge, un certain nombre de mots d’origine allemande se sont infiltrés dans le patois d’Auxelles. La raison en est que, durant plus d’un siècle une immigration massive de mineurs d’origine germanique s’est produite au point de constituer une fraction importante de la population, surtout à Auxelles-Haut. Il faut citer aussi les fonctionnaires du seigneur ; la famille de Ferrette qui possédait la seigneurie d’Auxelles depuis 1520 était en effet d’origine alsacienne, donc germanophone. Enfin, surtout après la défaite de 1870, eut lieu un important flux de réfugiés alsaciens vers notre région. Les échanges avec l’Alsace voisine, favorisés par le développement des moyens de communication, continuent encore de nos jours.
Les fonctionnaires
En 1709, Jean-Claude Juster (de Schuster : cordonnier) était procureur fiscal du seigneur. On lui donne parfois le titre de « maire » du seigneur, c’est dire qu’il était le représentant des Ferrette, dont la présence à Auxelles n’était pas permanente. Il habitait l’ancienne maison Py, encore entourée de nos jours de plusieurs bâtiments qui furent des fermes seigneuriales. Né vers 1686, Jean-Claude Juster mourut en 1733 à l’âge de 47 ans.
La famille Juster devait être restée influente puisqu’elle obtint que ses défunts soient transférés de l’ancien cimetière dans la nouvelle église le 24 octobre 1758. Ils y avaient été précédés, le 20 mai 1757, par les défunts de la famille seigneuriale. Cette église, qui se trouvait au centre du cimetière actuel, avait été inaugurée le 12 décembre 1756 par M. Bassang, curé de Chaux.
Une autre famille au service du seigneur est celle des Steinmesse (de l’allemand Steinmetz : tailleur de pierre), qui lui fournissait ses « silvarum custodes » (gardes forestiers). Dès 1619 Jacob Steinmetz était propriétaire à Auxelles-Bas. Le nom a connu de nombreuses orthographes : Steinmesse, Stemetz, Stimess, Stemmes… Il existe encore des Stimesse à Besançon actuellement.
Plus près de nous, Michel Steinmesse, né en 1732, était instituteur en 1788. A sa mort le 23 frimaire de l’an V, il était « recteur des écoles ». Un cas curieux, celui de François Stimesse, né le 4 janvier 1769, marié à Marie-Antoinette Lejeune. En 1806 il exerce la profession de menuisier. Promu garde-champêtre et sans doute très fier de cette distinction il signe en 1811 Stimesse-Weibel (de l’allemand Weibel : sergent, huissier, appariteur) . Il est remarquable de constater qu’après des centaines d’années de présence à Auxelles un immigré allemand se souvienne de son ancienne langue.
Il est encore plus curieux qu’il ait pu faire enregistrer les naissances de ses enfants : Elisabeth-Christine, le 20 septembre 1812, et Pierre-François, le 6 janvier 1815, sous le nom de Steinmess-Weibel, alors que les règles de l’état civil étaient depuis longtemps fixées. Promu garde-forestier en 1815, il signe dès lors simplement François Stimesse.
Autres fonctionnaires : en 1757, un dénommé Gaibe (alias Gabe ou Gable) était connu comme bourgmestre de Auxelles-Haut (ce nom est la prononciation allemande de Gabel : la fourchette). En 1619, Johannes Fischer (de l’allemand pêcheur) d’Auxelles-Haut était juge des mines de Giromagny. A la même date, Cladt Schnider (pour Schneider : le tailleur) est sergent à Auxelles-Bas.
Les mineurs
Propriété des empereurs d’Autriche, les mines polymétalliques de la région furent soumises à une exploitation intensive, surtout dans la deuxième moitié du XVIe siècle. Pour cela on avait fait appel à des spécialistes originaires d’Autriche (Tyrol, Carinthie) et d’Allemagne (Saxe). Leurs patronymes, dans la plus pure tradition allemande, étaient en général composés de deux termes ayant une signification, car ils traduisaient à l’origine la particularité ou la profession du fondateur de la famille. Peu de ces migrants ont fait souche à Auxelles.
Parmi les premiers mineurs à s’être installés à Auxelles figurent les Hanspergue, dont la présence est attestée dès 1580. Ce nom, aux orthographes variées, vient de l’allemand Hans : Jean et Berg : montagne. En 1672, Thomas Ensperge est mineur à la mine Saint-Jean d’Auxelles. Vers 1682 naissait Jean Hantzpergue mort à Auxelles-Bas le 15 mars 1746, à l’âge de 84 ans. Jean-Jacques Hantzpergue meurt également à Auxelles-Bas à 70 ans le 19 janvier 1758.
Lors du recensement effectué à l’occasion de la famine de 1698 on trouve parmi le personnel de la mine de Saint-Jean : Jean Ansperg (il nourrit 7 bouches), Jean Hansperg le Jeune qui a 4 bouches à nourrir, Jacques Hanspergue qui a également 7 bouches à nourrir. Plusieurs Hanspergue ont été « houtmann » de la montagne Saint-Jean ; par exemple Jean Entzbzerguer, mort en 1701 et l’un de ses fils, Jean-Claude. Mais le patronyme donne lieu à interrogation ; certains membres de cette famille signent Hans, comme prénom et Pergue (Berg : la montagne) comme patronyme. Tout se passe comme si la forme Hanspergue résultait de l’erreur d’un scribe ayant accolé un prénom et un nom pour former un nouveau patronyme. C’est ce qui pourrait expliquer la tendance très nette, malgré des flottements, à revenir à la forme Pergue du nom, tendance défendue sans faille par les branches cadettes de la famille.
Un exemple typique est celui de Mathias Hantzpergue, né vers 1726 et qui a épousé Marie Sarazin le 13 juin 1752 sous le nom de Mathias Hansberg. Il a déclaré ses six enfants tantôt Hanspergue, tantôt Pergue. Lui-même est mort à 47 ans le 29 juin 1773 sous le nom de Mathias Pergue. Sur les 44 naissances enregistrées dans cette famille de 1744 à 1807, 16 seulement ont été déclarées Hanspergue, forme qui cependant s’est maintenue jusqu’à nos jours dans la région.
Une autre famille de mineurs, celle de Couqueberg (Couqueberg en 1720, Koukberg en 1729, de l’allemand Kucken, guetter et Berg, la montagne, donc : observatoire, belvédère). Dès l’année 1616, Coquebergue dit « du Tyrol » était mineur à Château-Lambert.
D’autres mineurs encore : Hymdressere dit « d’Auxelles » est mineur à Servance en 1614. Lorentz Hinderser d’Auxelles-Haut figure comme propriétaire dans un terrier (matrice cadastrale) en 1619. Ce nom vient de Hindern : empêcher ; donc c’est un empêcheur. Stadelmann ou Stallemann (garçon d’écurie) mineur à Auxelles-Haut possédait une maison à Auxelles-Bas en 1709. Steinackre (ou Stainacre, Stainnach) de Steinacker (champ de pierres) est mineur à Auxelles-Haut en 1709.
Dans le terrier de 1619 à 1621 figurent également à Auxelles-Haut :
- Schultheis (ou Heissen) de l’allemand Schultheiss : maire, juge.
- Stichenfrau, de Sticken (broder) et de Frau (femme), donc brodeuse.
- Weynacht Hanns de Weinachten : Noël.
- Pfender Lorentz (Fendeler en 1709, Phendler en 1746) a abouti à Fendeleur de Finden : trouver donc découvreur.
- Parfois une lettre parasite figure en tête d’un nom. Exemple en 1714: Vderich qui deviendra Westrich (de Westlich : de l’ouest, occidental).
- Kipffer (1614), Kieffler (1761) puis Kephler, Keffle, Kephler et finalement Kefleur à partir de 1793, soit Kiefer : machoire ou Kufler : tonnelier.
- Waldner (forestier) a abouti à Valdenaire, bien que la forme primitive existe toujours à Belfort.
Les tard venus
Il y a aussi une foule d’émigrants d’origine germanique qui ont fait et font encore des apparitions dans la région d’Auxelles. Il y a bien sûr les nombreux Klein : petit, Schwartz : noir, Braun : brun, Koenig : roi, Graff : comte, Herzog: duc etc.
Au début du siècle, les soins du docteur Tauflieb {littéralement : qui aime le baptême) étaient appréciés à Auxelles.
Adelheim (maison noble), en patois : Adlem, était garde forestier dans le secteur de Giromagny. Son fils a participé à l’épreuve du 110 mètres haies aux Jeux olympiques de Los Angeles en 1932.
Anderhüber (de ander : autre et de hüber : au-dessus de) se prononçait en patois Androubre. Des formes simplifiées du nom se rencontrent encore : Oubre, Houbre, Hueber.
Rumelhard, de bruit et violent, donc : le vacarme.
Liebelin, ancienne famille d’Auxelles-Haut qui y possédait une fonderie d’art (détruite en 1945), succursale d’usines plus importantes à Saint-Sauveur près de Luxeuil (de Liebe, amour et de Lein : diminutif affectueux, donc quelque chose comme « petit chéri »). Il faut faire une place particulière à deux familles : les Tritter et les Hasquenoth.
Le plus ancien Tritter connu est Rodolphe Dritter (mot allemand signifiant troisième) né à Saint-Stephan (Obersasslen ?) dans la région de Berne. L’un de ses fils, Jean-Stéphane Tritre (prononciation allemande de dritter) né vers 1713, se marie à Sewen avec Anne-Marie Trommelschlager (littéralement batteur de tambour) , nom impossible pour une oreille française puisqu’à son arrivée à Auxelles elle s’est trouvée enregistrée sous le nom de…Tabouret. On pourrait croire à une plaisanterie si la belle-fille de ce couple (épouse de Etienne Tritre, né vers 1745) Marie-Barbe Baschung n’était pas devenue elle-même Beaujon (alias Baujon, Bachon, et même Sachon). Les…
(La suite dans : Patronymes d’origine allemande à Auxelles et dans la région , par Jules-Paul Sarazin, page 6)
L’amicale société de gymnastique de Giromagny
Avant le sport spectacle d’aujourd’hui, quand n’existaient, ni cinéma, ni télévision, des jeunes, garçons et filles, avaient déjà le souci d’entretenir et de développer leurs capacités physiques pour les mettre au service de leur entourage et de leur patrie. C’est l’histoire de la plus ancienne société de Giromagny dont il est difficile de retracer avec certitude la naissance et les débuts.
Mais lorsqu’on est presque centenaire, il est normal qu’on oublie un passé déjà lointain.
La fondation
D’après un premier document, l’Amicale aurait été créée en 1897 avec pour objet principal la pratique de la gymnastique masculine et féminine, de l’athlétisme et obligatoirement de l’éducation physique. Elle fut déclarée en préfecture le 19 juin 1903 et, à la pratique de la gymnastique est ajoutée celle du tir. Le premier siège social était à Giromany, rue Thiers.
Les statuts furent revus et révisés en assemblée générale le 28 janvier 1952 et nous lisons alors que la société avait été fondée le 12 août 1901, agréée par l’administration le 5 mars 1914 sous le n° 6939 et affiliée à l’Union des sociétés de gymnastique de France sous le n°989.
Il semble que la date de 1897 soit la bonne car deux vieilles photos montrent une présentation gymnique sur la place de Giromany et sont datés du 14 Juillet 1899. Mais une autre photo, non datée, de la section féminine fut prise à l’occasion du 25e anniversaire de la fondation. L’âge des jeunes filles permet d’évaluer l’année 1926, soit 1901 pour la fondation.
Les dates diffèrent, mais au fond, peu importe. L’Amicale. dont la devise est « patrie, solidarité », a pour but :
- développer les forces du corps par des exercices de gymnastique, préparer les jeunes gens à l’obtention du brevet militaire de gymnastique et de tir,
- la création d’une section féminine pour permettre aux jeunes filles de faire des exercices de gymnastique et d’éducation physique appropriés à leur sexe,
- recevoir les soldats rentrant du régiment afin qu’ils puissent s’entretenir dans la pratique de la gymnastique, du tir et de l’éducation physique.
Elle a son siège social à la salle de gymnastique. Les fondateurs furent Louis Bellenot, manufacturier, gendre d’Edouard Warnod, et Louis Faivre. alors directeur de l’école des garçons. Ils furent sans doute les premiers bienfaiteurs qui permirent le démarrage. Les entraînements se faisaient alors sous le préau de l’école et les gymnastes étaient d’anciens élèves. Le premier moniteur fut Joseph Faivre, neveu du fondateur. En 1921, l’activité s’accroît d’une section de préparation militaire dirigée par Félix Faivre.
Terrain et bâtiments
En 1921, la société loue à la commune de Chaux, pour une durée de neuf années consécutives, un terrain sis à Chaux, lieu-dit Prés Rischy, « de la contenance d’environ 165 ares, tenant du levant à la route n°4 (la route départementale 465), du couchant à MM Kestner et Cie, du midi au chemin de Bellevue et du nord à Villaumé ». Le prix annuel
de location était de cent francs. Ce terrain a-t-il été utilisé et quelle était l’intention des loueurs ? On ne sait pas. Un document notarié passé à l’étude de maître Schoffit, notaire à Giromany en date des 25 avril et 8 mai 1923, nous apprend que la société acheta à Jules Armand Felpin et à Jeanne Louise Joséphine Dumas son épouse, demeurant alors à Vincennes, 6 rue Saulpice, une parcelle de terrain de 26 ares et 22 centiares environ, cadastrée à l’ancien cadastre, section D, n°150 et 151, et que sur ladite parcelle de la société a fait édifier un bâtiment. Le prix en était de 4500 francs, payés en espèce en présence du notaire.
La construction du bâtiment actuel, faubourg de France, a dû suivre ; bâtiment de 20,50 mètres de long sur 7,50 mètres de large, couvert d’ardoises. D’après un ancien moniteur, qui le tient de Félix Faivre. fils de l’un des fondateurs, on aurait utilisé les matériaux d’une première salle située rue Thiers. Il pourrait s’agir d’une salle de cinéma qui se trouvait sur le terrain de l’actuelle propriété n°1, faubourg de France. Un des soucis majeurs des dirigeants fut toujours l’état du local et du terrain attenant. Dans les années 1960, l’institut médico-éducatif prêta un temps ses locaux à la société. Quant à la salle du C.O.A.S.E.C. – salle de sport proche du collège – son utilisation pose le problème de la mise en place et de l’enlèvement des agrès nécessaires aux évolutions : poutre d’équilibre, cheval d’arçon… matériel lourd à déplacer et travail qui ampute sérieusement les heures allouées.
Le bâtiment du faubourg de France a été maintes fois restauré, en particulier en 1970. L’aide généreuse de la municipalité, par une subvention exceptionnelle, le travail bénévole des animateurs et des prêts ont permis le réaménagement nécessaire : réfection du sol et pose d’un tapis, installation d’un chauffage au mazout avec une cuve extérieure, pose d’un plafond, réfection de l’installation électrique et mise en ordre du plateau d’évolution extérieure. Une vingtaine d’années se sont écoulées et les mêmes problèmes d’entretien se posent encore. L’urgence est même accrue car la couverture d’ardoises est en si mauvais état que l’utilisation du local devient très problématique.
La vie de la société
Les présidents successifs furent, sous toutes réserves, Louis Bellenot, Félix Faivre père, Charles François, Louis Farouelle, Jean Boigeol, Jean Canda et Louis Renard.
Deux photographies montrent la société avant 1914. L’une avec la clique d’une douzaine d’instruments, clairons et tambours, avec, à gauche, Joseph Py qui fut moniteur entre 1904 et 1910. L’autre présente une démonstration à la barre fixe, Grande place, le 14 Juillet. On peut remarquer l’importance de la foule et la tenue des gymnastes qui portent la large ceinture de drap noire autour des reins.
L’Amicale participa, avec La Belfortaine, à l’une ou l’autre sortie en Alsace, alors allemande. Nos gymnastes étaient accueillis chaleureusement par une population heureuse d’avoir des contacts avec tout ce qui rappelait la patrie perdue. Dès 1905, le conseil municipal avait voté une subvention annuelle de 200 francs pour encouragement.
En 1912, suite à une demande, le conseil prévoit d’accorder une subvention de 500 francs pour organiser à Giromagny le 29e concours de l’Union des sociétés de gymnastique du Pays de Montbéliard en 1914. On peut se demander si le concours eut lieu, la guerre ayant débuté le 3 août.
La société repartit après la Première Guerre mondiale avec un effectif variant de quinze à trente gymnastes, adultes et pupilles, et une section féminine d’une vingtaine de membres. Certains moniteurs ont marqué leur époque : Louis Marion de 1937 à 1958, décédé prématurément en 1963, Maurice Bougeard et Eugène Anger. Peu avant 1939, il fut demandé à Albert Faivre, qui achevait son service militaire comme officier de réserve, de mettre sur pied une section de préparation militaire élémentaire.
La Seconde Guerre mondiale marque un retrait relatif, avec des membres prisonniers, morts au combat, déportés et les multiples gênes de l’Occupation. Une stèle portant les noms de dix membres disparus, visible de la route, fut inaugurée solennellement en 1950.
Voici leurs noms : André Reiniche, Lucien Pichenot, Maurice Peroz, Attilio Dalceggio, Prosper Bredmestre, Jean Bredmestre. André Thevenot, Henri Marion, Marcel Prevot et Gaston Benoit. Et une inscription : « Gymnastes, souvenez-vous ».
Comme toutes les activités humaines, l’Amicale connut des hauts et des bas en fonction du recrutement et du dynamisme des dirigeants et moniteurs. Tour à tour, telle ou telle section, ou la clique, entrèrent en léthargie ou…
(La suite dans : L’amicale société de gymnastique de Giromagny, par Jean Demenus, page 9)
Les tribulations d’une mémoire qui ne voulait pas disparaître…
Pour tenter de sauver les témoins de l’activité brassicole du Territoire de Belfort, deux ans de lutte, cent courriers aux décideurs. une association de défense n’ont pu avoir raison de l’indifférence des pouvoirs locaux : la brasserie de Lachapelle est rayée de la carte.
Les bâtiments de l’ancienne brasserie de Lachapelle-sous-Rougemont (90), paysage familier aux usagers de la RN 83, et souvenir gravé dans le palais des habitants de notre région, sont actuellement aux 4/5 rayés de la carte. Sur dix hectares, bâtiments industriels, glacières en surface, caves voûtées, maisons d’habitations. terrains agricoles… sont démantelés pour faire place à une zone industrielle.
Une histoire
Activité caractéristique de l’Est de la France, créée sur ce site en 1857 après avoir débuté fin XVIIIe dans la cave du cabaret local, l’entreprise a cessé son activité en 1962, cédée par la famille Grisez à la brasserie de Colmar, à un moment où les regroupements des brasseries de l’Est ne permettaient plus de continuer I’activité à l’échelon familial.
Les acquéreurs, prenant possession de la clientèle et des techniques de fabrication, firent procéder à la dispersion du matériel au gré des acheteurs. Après liquidation de celui-ci (en 1966), l’ensemble a été cédé à un particulier dont les projets d’utilisation n’ont jamais été menés à bien.
Les locations parcellaires pour des parties de l’ensemble, ateliers divers ou logements de fortune, se sont succédées sans que le moindre entretien ne soit pratiqué. Au vu de tous, le site s’est vite dégradé au point de devenir le terrain propice aux décharges sauvages de toutes sortes, ce que l’on nomme une friche industrielle. On comprend alors
l’attitude des élus locaux de mettre fin à « la verrue » que constituait l’ensemble du site, en envisageant l’acquisition de celui-ci.
Un contexte favorable
Dans ce même temps, début 1991, un colloque sur la réhabilitation des friches industrielles se tenait proche de nous, à Mulhouse, au cours duquel Monsieur Gros, président du CESTIM, s’inscrivant dans l’esprit du colloque, évoquait la situation de la brasserie de Lachapelle.
Au cours de celui-ci, la recommandation n° R(90) 20 du comité des ministres aux états membres du Conseil de I’Europe concernant la protection et la conservation du patrimoine technique industriel plaçait cette préoccupation au centre du débat.
Monsieur Giusti, chargé de mission de la DATAR (2), parlant des friches industrielles, s’exprimait ainsi : « elle jouent un role révélateur ».
On eut pensé que ce témoignage unique de l’activité brassicole dans le Territoire de Belfort allait être pris en considération, faisant état de la mémoire populaire et de sa valeur ethnologique. Beaucoup de positions étaient prises dans ce sens, entre autres : En mars 1991, J. L. Buchwalter, adjoint au maire de Lachapelle, ne manquait pas de dire: « Je suis convaincu que l’intégration du passé (ici, brassicole), avec de nouvelles entreprises est une opportunité et ne manquera pas de devenir une image plus promotionnelle que la simple ZAC(5)… »
En novembre 1991,le président du syndicat des brasseurs d’Alsace, Monsieur Debus, dans un courrier au maire de Lachapelle : « Au moment où le tourisme industriel connaît un succès croissant, il nous paraît opportun de sauvegarder l’ensemble architectural de l’ancienne brasserie de Lachapelle et de l’inscrire à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques. »
La position des pouvoirs publics
La commune de Lachapelle, devenue propriétaire du site, cédait celui-ci et confiait l’aménagement de la zone en tant que ZAC (5) à la SODEB (3), se dégageant totalement du problème et relevant les remarques faites à l’occasion de l’enquête publique, comme étant du sentimentalisme.
Le conseiller général du canton, vice-président chargé de la culture, écrivait : « Le département ne compte pas se saisir du dossier. »
Commune ? département ? Etat ? SODEB ? qui fera quoi ?…
Le désintéressement des pouvoirs publics, alors propriétaires du site, quant à sa conservation a incité les descendants des anciens brasseurs à demander la protection du ministère de la Culture au titre de la loi sur les monuments historiques, seule procédure pouvant éviter la démolition qui, déjà, était décidée.
Les responsables de la DRAC (1) dépêchés sur les lieux, considérant « qu’il n’y avait une minute à perdre », ont immédiatement demandé une étude qui fut l’objet d’un contrat avec Monsieur Philippe Voluer, conservateur du musée de la Bière à Stenay. Le délai fixé à trois mois et la somme engagée auguraient de l’importance de la démarche. Un
rapport de 73 pages accompagné de nombreuses annexes fut remis à la DRAC en décembre 1991, qui concluait :
- s’agissant du bâtiment de brasserie construit en haut du village en 1857 : « Cette construction est à protéger en priorité (classement). C’est en effet un des rares vestiges des brasseries construites en France à partir de 1850, donc un des premiers témoins de I’architecture industrielle brassicole. »
- s’agissant de la tour de refroidissement de 1936-38 : « Elle obéit au critère architectural de l’époque imposé par l’école de brasserie de Nancy et l’évolution des techniques, des bâtiments identiques existent ou existaient… Ils ont tous été détruits ou transformés. »
- s’agissant des caves (8) souterraines. voûtées en berceau. représentant une surface de 650 m² : « Elles se trouvent dans un état de conservation parfait. » (Voir La Vôge n°11)
- s’agissant des glacières : « D’une capacité de 1500 m3 pour la grande, 520 m3 et 390 m3 pour les deux petites : bâtiments en surface, technique ancestrale répondant aux besoins de froid pour la fermentation et la conservation, et assurée par l’accumulation de volumes de glace récoltée sur les étangs durant l’hiver… »
« Il est pratiquement impossible de trouver aujourd’hui en France, dans un même lieu et dans un état de conservation correct, un bâtiment de salle de brassage, des glacières
du XIXe siècle et des caves en très bon état, une tour de refroidissement typique des années 1936.
« Ces trois groupes de bâtiment devraient eux aussi être protégés en priorité et rapidement (inscription). »
Réunie le 25 mars 1992 à Besançon, la COREPHAE (4), commission appelée à se prononcer sur ce dossier, ne retient pas celui-ci. Les conditions dans lesquelles a siégé la commission donnent sujet à réflexion : la personne chargée de présenter le dossier était absente ce jour-là, ainsi que le représentant du Territoire de Belfort désigné. De nombreux absents parmi les membres, et de la part des personnes présentes une position abstentionniste que justifierait bien le manque d’informations ou le désintéressement.
Dans le même temps, en date du 26 mars 1992, un courrier du cabinet du ministre de la Ville et de l’Aménagement du Territoire, Monsieur Delebarre, nous informait que :
« Il est prévu de faire bénéficier ce patrimoine exceptionnel des dispositions protectrices de l’article 2 de la loi de 1913 modifiée… A cet effet, les bâtiments seront inscrits dans les meilleurs délais à l’inventaire des monuments historiques… »
S’agissant de ces deux décisions contradictoires, l’Est Républicain, sous la plume de François Zimmer, écrivait : « Une incohérence qui empêchera sans doute la mise en bière de l’ancienne brasserie, pour peu que les deux tendances opposées s’accordent pour allier le passé et I’avenir » (E.R. 3.4. 1992).
Dans ces conditions. une révision de la décision de la COREPHAE était demandée, et la réponse de « non recevoir » est arrivée le 10 avril sous la plume du préfet de région,
président de la COREPHAE : « Considérant que les bâtiments vidés de leur contenu ne présentaient pas un grand intérêt architectural … et que la conservation n’aurait pu se faire que si l’ensemble des collectivités territoriales et locales se mobilisaient aux côtés de l’Etat. » Ce n’était certes pas le cas – et chacun à tous les niveaux et dans tous les domaines de renvoyer la balle à l’autre.
Exemple : Monsieur Chevènement, en date du 2 mars 1992, précisait que seule une démarche engageant l’Ecomusée d’Alsace pourrait permettre de sauver ce précieux témoignage du passé brassicole ». Sic !
Monsieur Mairot, conservateur du musée du Travail et des Cultures comtoises. le 9 mars. nous renvoyait à la DRAC (1)…
Monsieur Bengio, directeur de la DRAC, en juin 1992, nous conseillait de nous adresser à Monsieur Mairot… Sic !
Le Parc des Ballons, sous la plume de Pierre Weick : « Il est nécessaire que la commune se saisisse de ce projet » (mars 92). Et combien d’autres…
Comme le dit l’adage, « les conseilleurs ne sont pas les payeurs ». Il faut malheureusement admettre que depuis le début de l’opération, ni la commune ni le département n’avaient une quelconque intention de conservation, et force nous est de dire que parmi les décideurs, la plupart reconnaissaient n’avoir jamais visité le site. Sommes-nous donc si loin de 1989 où l’organisation d’une rétrospective sur la vie de la brasserie avait été organisée par l’association « La chapelloise », laissant augurer d’une solide volonté de conserver une page de la vie locale dans la mémoire populaire ?
Un élément déterminant : le syndicat mixte d’aménagement et de gestion de la zone d’activité multisite nord.
Par arrêté préfectoral du 27 novembre 1991 était créé à l’initiative du conseil général un syndicat regroupant 21 communes, afin de favoriser l’implantation d’entreprises sur des terrains mis à disposition par celles-ci (pour ce qui nous concerne, les terrains de la brasserie de Lachapelle) et de leur garantir un revenu de taxe professionnelle. Le 26 février 1992, la nomination de Monsieur Buchwalter, élu de Lachapelle, en tant que président du syndicat, commençait à donner des inquiétudes lorsque celui-ci déclarait « que l’aménagement de la zone serait étudié pour sa rentabilité plus que pour la conservation » (E.R. 1.4. 1992). Il appartenait alors à une commission d’implantation des entreprises de décider des cessions ou locations de parcelles (article 19). Celles-ci furent définies par la SODEB (3), vouant à démolition la tour de refroidissement dont l’implantation gênait les projets déjà établis.
La presse faisant état de la démolition certaine, des regards ont commencé à se poser sur le bâtiment qui, par son originalité, aurait pu être le « fleuron de la zone ».
Une association pourrait sauver la tour
Certes, la conservation des bâtiments d’aspect très vétuste n’était pas chose évidente pour la plupart des « chapelons ». Yves Grisez, descendant des brasseurs, à l’origine de la demande de classement par le ministère de la Culture, adressa à tous les habitants du village, en mai 1992, une lettre attirant leur attention sur l’action déjà engagée et sur l’intérêt que la conservation de certains bâtiments représentait pour la commune: « Demain, il sera trop tard; il faudrait une volonté locale clairement exprimée… » Pas le moindre écho ne se fit entendre, six mois se sont écoulés sans aucune réaction.
Et pourtant ! La curiosité d’un enfant de Lachapelle, Christophe Stemmelin, élève en architecture, a fait prendre conscience de l’intérêt du site et de l’originalité de la tour de refroidissement. Un coup de coeur du professionnel suffisamment exprimé pour que son père, Lucien Stemmelin, artisan menuisier au village, prenne contact avec
Jean-Louis Buchwalter, président du syndicat d’aménagement de la zone multisite nord, dans le but de créer une association de défense : les encouragements prodigués par celui-ci, les contacts avec la SODEB (3) permettaient tous les espoirs.
D’un commun accord, un appel est lancé le 17 janvier 1993 dans la presse locale et sur Radio-France-Belfort, incitant les personnes intéressées à contacter Monsieur Stemmelin. Une vingtaine de sympathisants se sont aussitôt manifestés, certains prêts à offrir leurs compétences et leurs services. Rebondissement encourageant qui débouche le 22 janvier sur la création d’une association loi 190 l. Le bureau rapidement mis sur pied est appelé à préparer un projet de réhabilitation axé sur la tour de refroidissement et la grande glacière.
Celui-ci sera l’objet d’une présentation par Lucien Stemmelin, lors d’une réunion du syndicat de la zone multisite, le 17 février. Le projet prévoyait :
- la reconstitution miniature de la brasserie,
- des salles d’exposition : musée brassicole, vitrines des entreprises de la zone et production du Territoire, rétrospective des activités ayant fonctionné à Lachapelle,
- un lieu de dégustation et de vente des produits locaux,
- une reconstitution animée de l’ancien réseau ferroviaire et autres modes de transport illustrant le rôle du Territoire, voie de pénétration.
D’ores et déjà deux cents signatures appuyaient notre demande. L’accueil réservé alors aux représentants de l’association par les membres du syndicat (représentants de 21 communes et du département) témoignait d’une volonté délibérée de ne pas donner suite.
Ainsi fut fait. La presse s’est fait un large écho des réactions des élus locaux : le conseiller général du canton estime qu’il y a déjà assez de musées dans le Territoire et que « quant à moi, lorsque je verrai la brasserie disparaître, ce sera une bonne chose de faite ». 19 communes sur 21 se prononcent pour la démolition de ce qui se trouve dans le périmètre de la zone industrielle.
Les bâtiments du bord de route étant épargnés, L. Stemmlin prend contact avec la SODEB pour acquérir le premier bâtiment de brassage (1857), les petites glacières, et troiscaves voûtées, un ensemble particulièrement représentatif de l’activité brassicole de la deuxième moitié du XIXe siècle. Les transactions s’engagent alors avec d’autres acquéreurs, artisans locaux, afin de modifier les parcelles prévues pour conserver à l’ensemble son intégrité. Les plans définitifs sont alors remis à l’association, et les conditions d’achat fixées à 120 francs le m² bâti, et 95 francs le m² non bâti. D’ores et déjà l’association disposait de 50 000 francs, dons de ses membres. Des pierres représentatives de parts de souscription seraient ensuite offertes aux nombreux sympathisants.
La démolition prévue étant imminente, sur conseil d’un représentant de la SODEB et en accord avec 1e démolisseur, une équipe se constitue afin de récupérer les matériaux susceptibles de permettre la restauration des bâtiments devant être acquis. Neuf volontaires ont pendant deux jours contribué à la récupération de 3000 tuiles, poutres, faÎtages, chevrons, dalles en grès, pavés de granit et vestiges divers de l’activité brassicole glanés in extremis dans les locaux abandonnés, tâche facilitée par la mise à disposition du matériel de l’entreprise Texiera : spectacle qui laissa perplexe François Liebelin, président de l’AHPSV, témoin de l’ardeur de l’équipe.
Chacun, séduit par l’enthousiasme du président Stemmlin, imaginait déjà le moment où les visiteurs se presseraient pour assister à la fabrication de la bière, telle qu’elle se faisait au temps de leurs aieux. Déjà, une chaudière de cuivre d’une valeur de 15 000 F attendait de retrouver la place qu’elle avait eue lors de la création de la brasserie : l’aménagement des caves, la reconstitution de la cour pavée, permettaient d’envisager des manifestations, reflets des traditions brassicoles.
Beaucoup de peine, beaucoup de rêves… C’était sans compter sur la décision que la commission d’implantation des entreprises allait prendre le 17 juin 1993. Le 18 juin au matin, avant même que les investisseurs potentiels n’en soient avertis, les engins défoncent les caves, les comblent de gravats, abattent les murs des glacières ; il fallait faire vite pour éviter tout recours… Ce jour-là, on faisait des heures supplémentaires… En l’espace de 48 heures, tout était abattu, réduisant à néant le projet d’un musée vivant à Lachapelle-sous-Rougemont.
Pourquoi tant de précipitation ? Il nous a toujours semblé possible de concilier le musée et les activités industrielles. L’avis ne nous a été donné que le 28 juillet. Aujourd’hui, sur le site, le silence s’est installé, les voix se sont tues, attendant que d’autres redonnent vie à notre village … ?
Conclusion
Sentimentalisme ? utopie ? inconscience ? acharnement ? Pour certains, certes ; mais surtout la profonde déception de ceux qui ont oeuvré pour la conservation du patrimoine. Dans une lettre ouverte à la presse locale le 28 juin 1993, nous écrivions : « L’irréparable est fait, le village a perdu une grande partie de son identité, et de ce qui aurait pu contribuer à sa renommée. » Et pourtant, plus que jamais des voix montent pour essayer de garder les miroirs d’un monde finissant. Ce n’est pas par hasard que Claude Berri a mis tout son art pour le tournage de Germinal.
Quand tout un monde industriel bascule en l’espace d’une génération, le désir d’en faire vivre la mémoire se fait ardent. Les initiatives se multiplient partout. La décentralisation en donne les moyens au pouvoir local. Dommage que dans notre département, malgré la sensibilisation et les efforts accomplis par la vivante AHPSV, le mouvement ne soit pas suivi, et F. Zimmer de conclure (E.R., 30.6.93) :
« Dommage que cet enjeu majeur soit synonyme de mépris pour le labeur des anciens. »
Bibliographie
Bulletin de la Société d’histoire sundgauvienne.
La Vôge n°8. n°9. n°11.
Est Républicain, 8 janvier 92, 3 avril 92, 8 avril 92, 12 avril 92, 7 janvier 93, 27 janvier 93, 18 février 93, 23 mai 93, 30 juin 93.
Le Pays, 27 mars 92, 9 avril 92, 6 janvier 93, 24 février 93, 1-9 mai 93.
L’Alsace. 21 mai 92, 29 juillet 92, 29 juin 93.
Notes
1. DRAC: Direction régionale des affaires culturelles.
2. DATAR: Direction de l’aménagement du territoire, action régionale.
3. S0DEB: Société départementale d’équipement du Territoire de Belfort
4. COREPHAE : Commission régionale pour le patrimoine historique, archéologique, ethnologique.
5. ZAC : Zone d’action concertée.
Il y a 100 ans !
« Les discours politiques continuent à éclore sous l’influence de la chaleur tropicale à l’approche des élections législatives. » (1)
L’été 1893 est chaud (2). Le climat politique n’est pas en reste. Les élections législatives du 20 août, faisant suite à des décisions parlementaires peu populaires, vont réveiller les passions.
Le 14 Juillet déjà
Comme nous avons pu le voir par ailleurs, la fête nationale du 14 Juillet permet à chacun de compter ses adeptes. Les républicains se félicitent des réjouissances et des
illuminations, les conservateurs jubilent à l’absence de lampions.
À Grosmagny par exemple, les républicains sont fiers. Tous les drapeaux tricolores sont sortis. L’école a pris un air de fête. Les restaurants de « L’Arbre Vert », « Les Deux Clefs » et « Le Cheval Blanc » sont pavoisés et illuminés. Lyrique, le correspondant de « La Frontière » exulte : « Pourquoi demeurer en arrière quand le soleil poursuit son
cours. En avant le peuple ! »
À Rougemont, les conservateurs remarquent avec satisfaction que si le bureau de poste, la gendarmerie et la demeure de I’instituteur sont brillamment décorés, la mairie
quant à elle, n’a reçu qu’un drapeau à I’entrée principale et quelques lampions, c’est donc une mairie rassurante…
Des lois contestées
Plus sérieusement, les nouvelles lois fiscales votées par le Parlement en cet été 1893 font couler beaucoup d’encre. Des taxes sont venues frapper l’affichage mural, les valeurs mobilières et surtout les vélocipèdes. Un comble ! Les radicaux regrettent que les députés n’aient même pas fait la distinction entre les vélocipèdes de luxe et ceux qui servent aux travailleurs… « La Frontière » fait remarquer que les conservateurs ont adopté sans sourciller cette taxe alors qu’ils ont refusé de voter l’impôt sur les valeurs mobilières.
Seules deux décisions semblent satisfaire tout le monde : la réduction des frais de justice d’une part et la diminution très sensible du prix des places de chemin de fer
d’autre part. Cette diminution étant tout simplement due à la suppression de I’impôt sur la grande vitesse (sic).
Deux, puis trois candidats
Bref, le décor est planté. Le combat pour les législatives du 20 août peut commencer.
Deux candidats briguent la place de député de Belfort :
- Armand Viellard, industriel, député conservateur du Haut-Rhin de 1885 à 1889, frère de Léon Viellard, maire de Grandvillars et conseiller général du canton de Delle.
- Joseph Grisez, médecin, maire de Lachapelle-sous-Rougemont, président du conseil général, conseiller général du canton de Fontaine et député radical sortant.
Des élections originales s’il en est : elles mettent aux prises deux républicains ! Si en 1885 M. Viellard était monarchiste – disons conservateur – il est aujourd’hui un « rallié » c’est-à-dire un des libéraux nouvellement acquis à la cause républicaine. Le président du Conseil, Charles Dupuy lui-même, ne déclare-t-il pas aux « ralliés » :
« Vous apportez votre force, vos mérites, vos efforts, soyez les bienvenus ! Elargissons la République pour que tous les Français puissent y entrer ! (…) Je félicite ces hommes d’avoir cessé de bouder, après tant d’années, contre les institutions de leur pays et d’avoir sacrifié leurs rancunes de parti à l’intérêt supérieur de la patrie. »
– Un troisième candidat vient tenter de brouiller les cartes. Il s’agit d’un socialiste révolutionnaire du nom de Morel, horloger de son état. Sa candidature apparaît d’entrée, aux yeux des radicaux, comme étant fomentée par les agents électoraux de Viellard pour enlever des voies à Grisez. A voir…
Joseph Grisez
Joseph Grisez, député sortant, aime à rappeler qu’en 1889 il s’est présenté sans programme pour lutter contre le boulangisme. Il se veut le défenseur zélé de toutes les libertés de l’Union vélocipédique ! En effet, dans son numéro du 20 juillet 1893, cette association affirme avoir
(La suite dans : Il y a 100 ans , par François Sellier, page 17)
L’école de Menoncourt
Dans un précédent numéro de La Vôge, la monographie de la commune de Menoncourt, rédigée par Emile Cuenat, instituteur et père de l’auteur de cet article, a permis d’évoquer les règles de la communauté observée jusqu’à la Révolution. Cette monographie comporte également des renseignements intéressats sur l’instruction primaire dans cette commune au cours du XIXe siècle.
Le plus ancien document relatif à l’instruction primaire est une autorisation d’exercer les fonctions d’instituteur à Jean-François Thiébaud. le 1er décembre 1818. Au 1er mai 1827 a été établi l’engagement d’un sieur Hans à remplir les fonctions d’instituteur moyennant 150 francs par an, somme à laquelle s’ajoutent 50 centimes par mois et par élève à verser par les parents. En 1830, l’instituteur ne reçoit plus que 100 francs par an et 1,50 franc par élève et par trimestre. La fonction est peu stable. Un instituteur n’enseigne guère que pendant un an.
Nous voyons successivement :
en 1830, Pierre Py;
en 1831, M. Courtot;
en 1832, M. Triolet ;
en 1834, M. Chapelier;
en 1835, M. Triolet;
en 1836, M. Mannillot;
en 1839, M. Calament;
en 1842, M. Girardey;
en 1844, M. Hulette, etc.
En 1842. l’indemnité accordée par la loi est de 200 francs, plus la rétribution de 50 centimes. En 1843, 300 francs sont alloués à l’instituteur et la commune sollicite un secours du département pour l’aider à payer cette dépense. Les deux délibérations reproduites ci-après sont des témoins authentiques du triste état des choses à cette époque.
Séance du 24 septembre 1832
« Le conseil municipal de la commune de Menoncourt s’est réuni au lieu ordinaire de ses séances, sous la présidence du Maire, pour délibérer sur les moyens de fixer le sort de l’instituteur primaire à l’effet de faire jouir Les enfants de la commune pendant six mois d’un enseignement qui commencera le ler novembre 1832 à finir le 23 avril 1833, pour la somme de 54 francs qui sera payée par les enfants qui fréquenteront son école.
Le maître sera obligé d’aller prendre sa pension par les maisons, là où il y aura des enfants qui iront en classe.
Et la commune sera encore obligée de mettre coucher et de blanchir l’instituteur dans une seule maison.
Somme suffisante pour l’instituteur qui est obligé de faire jouir les enfants de la commune d’un bon enseignement. »
Séance du 5 janvier 1833
« Le maire a fait connaître la grande indigence qui règne dans la commune, que l’école est presque déserte, qu’il y a environ 30 enfants qui iraient volontiers à l’école et qui sont forcés de se priver de l’enseignement à cause de l’indigence.
À cet égard, le conseil municipal se voit obligé de recourir et de solliciter les bontés du Préfet du département du Haut-Rhin, à l’égard de ces pauvres malheureux pour que le préfet veuille bien accorder quelques secours pour que les malheureux puissent recevoir L’instruction. En le faisant, ils adresseront des voeux au Ciel pour Votre Grandeur… Ainsi fait et délibéré… »
Le premier cours pour adultes a eu lieu en 1866. Il fut fait gratuitement par l’instituteur. L’éclairage fut payé par les auditeurs. En 1826 avait été prise une délibération pour construire une école. Le devis s’élevait à 5 400 francs. La création de l’école actuelle fut demandée en 1863. Construite en 1865, ouverte l’année suivante, elle remplace celle qui avait été bâtie en 1829. L’architecte, M. Tisserand de Belfort avait établi un devis de 14000 francs qui fut dépassé. En 1884, un nouvel aménagement et divers travaux coutèrent 3 536 francs, non compris l’achat de l’horloge communale dont le prix fut de 825 francs. »
Un épisode de la guerre des livres scolaires à Menoncourt
Mon père avait rapidement conquis l’estime de toute la population de Menoncourt. Il était aimé par ses élèves et leurs parents lui étaient…
(La suite dans : L’école de Menoncourt, par Pierre CUENAT, page 21)
Rodolphe Sommer (roman) 2 – Le syndicat
Résumé : l’industriel du textile Rodolphe Sommer s’apprête à investir massivement dans de nouveaux métiers, plus modernes et productifs. Le projet suscite l’inquiétude de ses ouvriers.
Le comportement de Rodolphe Sommer, vis-à-vis de son personnel, était le fidèle reflet d’une facette de son caractère. Il tenait celui-ci, non de son père, mais de son ascendance maternelle. M. Sommer père n’avait jamais pu se reconnaître en lui.
Quel bel et excellent homme il faisait au moral ! Un homme de l’époque héroïque du tissage à bras, qui, parti de rien, ou presque, s’était fait une situation enviable dans l’industrie naissante du textile. Un homme dont ses ouvriers n’avaient jamais eu à se plaindre, qui semblait vivre à leur rythme, connaissait toutes leurs difficultés et se montrait toujours disposé à leur venir en aide.
II avait épousé une demoiselle de Melville, qui ne possédait pas un sou vaillant, mais une plastique admirable. Une personne qui avait été admise à la cour de Napoléon III et servit, durant un temps, de demoiselle d’honneur à l’impératrice Eugénie. Un temps assez court il est vrai, tant son caractère tranchait sur celui de ses compagnes, était dépourvu de bonne grâce et de souplesse… Cette jolie personne qui était volontiers tranchante et agressive, avec une haute opinion de soi, ne devait pas tarder à déplaire. La comtesse de Pourtalès, qui avait toute la confiance de Sa Majesté l’impératrice, lui suggéra cette union avec M. Félix Sommer, dans le but d’assurer l’indépendance matérielle de la jeune femme, de redorer quelque peu son blason et de délivrer la cour de sa présence. Rodolphe Sommer fut le seul fruit de cette union.
Celui-ci avait partagé l’élan jeune et brutal de son temps. Par lui poussé, il n’avait pas redouté les faux pas, les écarts. Il s’était publiquement livré au mal, exposé sans tact et discernement, s’était enfoncé dans ses actes impies. Tout ce qui exaltait un sentiment de puissance, la volonté de puissance, la puissance elle-même étaient bons pour lui. Etait mauvais à ses yeux, tout ce qui avait ou semblait avoir racine dans la faiblesse. Tout sentiment de compassion et de justice lui était étranger. La pitié pour les humbles et les déclassés était, selon lui. néfaste.
Il croyait en son étoile, était persuadé que son intelligence et sa culture le rendaient capable d’apprécier les vraies valeurs. Mais il ignorait systématiquement les courants réformateurs qui agitaient les entreprises industrielles, à l’heure de la vapeur, de la machine, du chemin de fer et de l’électricité. Il entendait diriger la sienne en maître absolu, prenait conscience de sa valeur, déjà se concertait et parfois se révoltait. Tant de choses avaient changé autour de lui, depuis son accession à la direction de l’usine paternelle !
Depuis une quinzaine d’années pourtant, une gare de chemin de fer avait été construite au sud-est de Vaudrey. Implantée en pleins champs, elle n’avait pas tardé a être reliée au centre-ville par une large avenue rectiligne, avec des trottoirs en bordure desquels s’étaient élevés de beaux immeubles à étages, dont les rez-de-chaussée arboraient des vitrines miroitantes le jour, flamboyantes la nuit. Parmi ces immeubles, les hôtels et les restaurants voisinaient avec les confiseries, maisons de thé, magasins d’alimentation, de souvenirs, de tissus d’ameublement et de confection. Un architecte, deux médecins, un dentiste, plusieurs avocats et avoués avaient installé leur cabinet de travail ou de consultation dans cette neuve avenue.
Le centre moyenâgeux de Vaudrey s’était lui-même transformé : l’ancien hôtel de ville, qui faisait face à l’antique collégiale, avait été aménagé en musée historique. Un bâtiment moderne abritait à présent les services municipaux, à l’angle des rues de Paris et du Parc. Celle-ci également récente, avait pris naissance en bordure d’un terrain vague, transformé en parc municipal. Des demeures cossues y avaient été édifiées, la sous-préfecture y avait été installée. Le maire, le juge de paix, plusieurs hommes d’affaires et riches propriétaires y avaient établi leur demeure. Un teinturier, plusieurs autres industriels s’étaient fixés à proximité de l’usine à gaz, à l’extrémité alors déserte du boulevard de Lyon. Enfin, des entrepreneurs de constructions et de travaux publics, avaient pris pied partout où ils avaient pu acquérir un emplacement favorable.
Malheureusement, ces entreprises nouvelles n’occupaient, outre un nombre variable de manoeuvres, qu’une main-d’oeuvre masculine spécialisée. Vaudrey n’avait pu leur fournir cette main-d’oeuvre. Elles l’avaient donc fait venir d’autres localités, parfois éloignées. Les nouveaux venus, ouvriers, cadres et patrons, avaient amené avec eux femmes et enfants. De nombreux amis et connaissances avaient suivi. La population de la petite ville, qui avait rapidement doublé, comprenait à présent, à côté de l’ancien, un salariat plus aisé, qui contribuait à faire prospérer le commerce local.
Les tisserands, qui n’avaient pas les connaissances techniques requises, ne pouvaient être admis dans les nouvelles usines qu’en qualité de manoeuvres. Beaucoup souffraient de cette infériorité. Aussi les plus prévoyants d’entre eux s’empressaient-ils d’y faire admettre leurs fils, en qualité d’apprenti, ce qui leur permettrait plus tard d’accéder à un emploi d’ouvrier qualifié. En définitive, pour les adultes, hommes et femmes, Rodolphe Sommer demeurait l’ultime recours. Il le savait et s’en réjouissait. Il conservait aussi l’illusion d’être encore le maître tout puissant devant qui tout devait céder. Et les apparences le confinaient dans ce sentiment, car la raison du plus fort demeurait la meilleure.
Plusieurs tentatives de formation d’un syndicat ouvrier avaient eu lieu. Toutes avaient échoué. Le spectre du chômage, la pression patronale aidant, avait fait reculer même les plus intrépides. C’est que la génération précédente, encore représentée à l’usine, avait travaillé au rythme des saisons. La fabrique étant alors fermée durant 1’été, les ouvriers qui ne possédaient pas un petit train de culture, devaient se disperser dans les entreprises agricoles, pour y demander un travail saisonnier. Les cultivateurs, qui ne disposaient encore d’aucune machine, les accueillaient volontiers, pour la fenaison et la moisson. Mais pour quel salaire ! Levés avec le jour pour faucher, ils déchargeaient encore à la nuit close, le foin ou le seigle abattus la veille. Tout cela pour la nourriture et un franc de salaire. Encore la nourriture leur était-elle parfois chichement mesurée. Puis les métiers mécaniques avaient provoqué une révolution industrielle. Une production accrue avait engendré un effondrement des cours des produits manufacturés, qui avait fait croître démesurément la consommation, dans le monde entier. Aussi le travail se poursuivait-il à présent toute l’année au tissage. Et voici qu’apparaissaient les grandes largeurs. Quel avenir réservaient-elles aux ouvriers de Rodolphe Sommer ? Grandcolas ne détenait-il pas le mot de l’énigme ? Comment s’accommodait-il de son douze-quarts ?
Pour l’heure, il était loin d’être satisfait, car il n’avait pu dérouler qu’une seule pièce de calicot, au cours de sa première quinzaine de travail. Certes, la seconde était presque achevée. Elle lui serait donc comptée pour la quinzaine suivante. « Il n’empêche, disait-il, qu’au tarif proposé et avec le produit de mon cinq-quarts, je ne pourrai, une paie sur deux, rapporter que trente-huit francs à ma femme ».
Puis il réfléchit que son grand métier lui donnerait toute satisfaction, s’il tournait un peu plus vite. Pour cela, ne suffirait-il pas de remplacer le pignon sur lequel s’enroulait la courroie de transmission, par un autre plus petit ?
Ayant soumis le problème à son contremaître, celui-ci accepta, avec le consentement du directeur, de procéder à l’échange proposé. Le métier battant alors à un rythme accéléré, il lui devint possible, après avoir achevé sa seconde pièce, d’en produire encore deux autres au cours de la quinzaine suivante. Tout compte fait et avec le produit de son cinq-quarts, il lui revenait soixante-douze francs, soit davantage qu’au contremaître, plus qu’au contremaître-chef lui-même.
Rodolphe Sommer se réjouit fort des brillants résultats qu’il avait obtenus. Mais il ne songea pas un instant à lui consentir une rémunération aussi élevée. Ayant fait appeler l’intéressé, il lui déclara sans ambage :
– Votre métrage est des plus satisfaisants et je vous en félicite. Mais je ne puis vous payer ce que vous attendez de moi. Je fais partie d’un syndicat qui s’y opposerait.
– Pour moi, Monsieur, chose promise est chose due.
– Je vous ferai remarquer que nous avons convenu d’un essai et que je n’ai pris aucun engagement, en dehors de celui de vous payer cinquante francs pour votre première quinzaine. Nous avions certes envisagé de vous compter, pour une largeur triple, trois fois le métrage d’un petit métier. L’expérience montre que ce n’est pas possible.
– Vous ne m’avez accordé un forfait que pour la première quinzaine. Il en résulte que pour la suite, et compte tenu de la largeur de mes pièces, je dois être payé au tarif que vous m’avez imposé avant de connaître le métrage que je pourrais produire. C’est à mon initiative que mon douze-quarts a été mis en état de tourner plus vite, avec des risques d’accidents de parcours d’ailleurs accrus. Je ne dois pas être pénalisé pour cela.
– Voyez-vous cela ! Et qui commande ici ? Est-ce vous ou moi ? En voilà assez Grandcolas ! C’est à prendre ou à laisser. Je vous ai fait payer cinquante francs pour une période d’essai. Au tarif, vous ne les auriez pas obtenus. Il apparaît maintenant que le tarif nouveau que nous avions envisagé de vous appliquer pour un travail nouveau, vous accorderait plus de soixante-dix francs. Je vous les paierai. Mais je mettrai à l’étude un autre tarif. Vous pouvez vous retirer.
Comme son interlocuteur demeurait debout et immobile, attendant le moment de poursuiwe la discussion, il ajouta :
– Sachez encore que je suis un homme considéré à l’Association industrielle du textile. Aucun de mes pairs ne m’a jamais parlé sur le ton que vous employez. Il n’ajouta pas, mais songea : enfin mon expérience professionnelle et les moyens dont je dispose font de moi un homme considérable. Lorsque les agrandissements que j’ai entrepris seront terminés et que mon nouveau département des grandes largeurs sera en pleine activité, j’accéderai à la présidence de la compagnie. A la condition évidemment de ne point indisposer mes collègues en pratiquant des tarifs excessifs. Payer plus de soixante-dix francs par quinzaine à cent ouvriers ? Décidemment, ce Grandcolas est plus sot que je ne l’aurais cru.
Grandcolas n’était pas aussi sot que le croyait Sommer. Il ne lui avait pas échappé que l’argumentation patronale s’appuyait sur la force syndicale. Son premier soin, à la sortie de l’usine, fut de relancer l’idée de la création d’un syndicat ouvrier. S’adressant à Jean Kubler, il insista :
– Tu comprends, les industriels sont syndiqués, nous ne le sommes pas. Si nous discutons individuellement de nos conditions de travail, nous ne pouffons nous faire entendre. Si nous nous obstinons, ainsi que j’en ai fait l’expérience, on nous dira que l’on peut se passer de nos services. Il faudra s’incliner ou chercher un autre moyen
d’existence. Car il suffira d’un…
(La suite dans : Rodolphe Sommer (roman) 2 – Le syndicat, par Pierre Haas, page 23)
Les fontaines de Giromagny
Son eau est si précieuse que, pour être admis à la boire, le dieu Odin a accepté d’abondonner un oeil. Pour ce prix, il a bu l’eau de la connaissance et de la poésie.
Le 18 septembre dernier, Giromagny a inauguré le « circuit des fontaines ». Au débouché d’une vallée qui recueille l’eau déversée en abondance sur le massif du Ballon d’Alsace, Giromagny comptait au début du siècle une quarantaine de points d’eau publics. Fontaines, fontaines-lavoirs, lavoirs, abreuvoirs, tous ne sont pas des « monuments » chargés d’histoire comme la fontaine Louis XV qui a fait l’objet d’un article écrit par François Liebelin et paru dans le n°3 de La Vôge, mais l’ensemble méritait sans conteste une mise en valeur.
La fontaine du Hautot, près de la place du Marché, est restaurée la première en 1991. L’opération s’intègre dans un projet plus vaste mené par la ville de Giromagny avec l’aide financière du département, de la région et de l’Etat et l’appui du Parc régional des Ballons des Vosges.
Le circuit regroupe des fontaines « monumentales » : fontaines du Hautot, Louis XV, Mazarin, les lavoirs de la rue des Ecoles et de la rue du Tilleul… Le chemin des fontaines, à partir du syndicat d’initiative, est une promenade dans l’histoire de Giromagny, ville minière puis centre textile.
Le circuit y est jalonné de neuf haltes, fontaines et lavoirs, mais de nombreux points d’eau sont encore alimentés dans la ville. Plus modestes que ceux retenus ils n’en sont pas moins un des éléments qui donnent son cachet et son charme à Giromagny.
Le promeneur curieux pourra se munir d’une brochure en vente au chalet du syndicat d’initiative. D’abord facile et agréable le livret donne les points de repères historiques nécessaires pour faire une bonne promenade.
Spigolatura
En mai dernier notre association a organisé à Giromagny la réunion des archéologues miniers de l’Est. A cette occasion des spécialistes, venus parfois de l’étranger, ont présenté plusieurs communications à caractère technique. Parmi les participants, Galileo Loesch, né à Trieste, ingénieur des mines à la retraite, a fait une communication peu technique mais originale.
Vous connaissez le fameux tableau de Millet : « Les Glaneuses ». Glaner, en italien « spigolatura », est l’action de ramasser les épis après la moisson. Regardez bien ce tableau. Les femmes penchées pour ramasser l’épi de blé, ont plutôt l’attitude de mère soignant amoureusement le fruit de leurs entrailles, que celle de travailleuses suant
la fatigue. C’est la glorification de la condition humaine dans son expression la plus humble, la plus simple, la plus sublime, celle qui, en fin de compte, fait toute la différence.
Dans les gisements étroits et irréguliers comme il en existe beaucoup dans les Vosges, il y a une phase principale de l’exploitation minière au cours de laquelle on enlève lagrande partie de minerai. Si on passe une deuxième fois pour contrôler qu’il y a pas quelques restes on parle en italien de « spigolatura ». A ma connaissance il n’y a pas de terme correspondant dans le jargon technique des autres pays, en France y compris. C’est comme si l’attitude mentale des glaneuses était une spécialité italienne. Essayez de vous mettre dans la peau d’un mineur de tradition allemande – c’est-à-dire dans un monde qui ne connaît pas le terme technique de « spigolatura » – dans une mine du type vosgien. Vous vous trouvez dans un chantier d’exploitation, dans un filon généralement bien délimité avec un marteau perforateur. Votre tâche est de faire des trous de mine dans les limites du périmètre du filon pour le charger d’explosif que vous faites sauter à la fin de votre journée pour détacher le minerai utile de la roche stérile.
Vous commencez votre travail, un trou après l’autre, selon les règles de l’art. Tout à coup vous apercevez sur la paroi, à votre droite des traces de minerai. Les traces sont minces mais claires et bien délimitées. C’est exceptionnel car généralement il n’y a pas de minerai sur les parois. Vous l’avez vu, cela vous étonne, mais vous l’oubliez sur le champ et vous continuez à faire vos trous dans le périmètre du filon, comme toujours, comme si rien n’était arrivé. Parce que faire des trous de mine dans le périmètre du filon est votre travail et votre seul travail. Vous n’êtes pas payé pour vous étonner à propos des traces exceptionnelles de minerai et on vous dit tous les jours, plusieurs fois, que vous êtes trop stupide pour avoir des idées ou, autrement dit, que vos idées sont par définition toujours stupides. Votre chef arrive pour la visite de contrôle en vous reprochant d’être paresseux car pendant la journée d’hier le mètrage des trous était au-dessous de la norme. Hier vous n’étiez pas là, mais vous savez par expérience qu’il est inutile de discuter. Il sait toujours toutes choses et vous ne savez rien. Dans une telle situation vous, bien sur, ne dites rien de votre trace de minerai sur la paroi. Pas par méchanceté, mais parce que c’est inutile dans le monde qui n’a jamais vu le tableau de Millet.
Changement de scène et de décor. Vous êtes un mineur de tradition méditerranéenne. Dans la même situation, dans un filon d’une minéralisation comparable. Les traces dans la paroi. Bon, en fin de compte, il s’agit de faire un trou supplémentaire d’un mètre : peu de chose. Et vous le faites. Votre chef passe pour la visite de contrôle. « Francesco, tu n’as plus confiance en moi ? Tu t’es fiancé avec Maria, sans rien me dire. C’est seulement ce matin qu’on me l’a dit. Es-tu fâché avec moi, ou est-ce un secret ? » Vous rougissez comme un enfant et ne savez pas quoi dire. « No, no, capo, pas ça. Excusez. Je croyais seulement que vous n’êtiez pas intéressé par ce qui arrive à un pauvre travailleur comme moi. Merci ! A propos chef, il y a d’étranges traces de minerai dans la paroi et j’ai fait un petit trou d’un mètre… seulement pour voir… On ne sait jamais. » « Francesco, tu es canon ! Tiens moi au courant. »
Le jour après, vous retournez sur place. Avec un trou d’un mètre vous avez trouvé un nouveau filon latéral bien minéralisé. Votre chef passe sur place. Après quelques minutes de silence : « Francesco. vous avez une semaine de congé payé pour fêter vos fiançailles. »
La « spigolatura » en action. Peut-être vous rappelez-vous qu’il y avait une période où les escadres de la république de Venise étaient supérieures à toutes les autres. On sait que cette supériorité était due en grande partie au fait que leurs rameurs étaient des marins libres, salariés, à la différence des rameurs des autres flottes qui étaient des esclaves enchaînés. La « spigolatura » est un chapitre toujours controversé. Comme du reste la glane est un chapitre controversé dans l’agriculture. Les fanatiques du coût de production sont pour I’interdiction sans discussion d’un travail déficitaire par définition. Mais le mineur pense que le problème est plus compliqué. C’est un problème parmi plusieurs autres, tellement complexes et aléatoires, qu’il n’est pas possible de faire la part du vrai et du faux avec les directives de caractère général qui sont les grands amours de nos docteurs en droit.
En tout cas… une vie sans « spigolatura » est comme une soupe sans sel.
L’église de Chaux
Après l’église de Rougegoutte et celle de Felon, c’est l’église de Chaux qui fait l’objet depuis quelques années, d’importants travaux d’entretien et de rénovation.
L’église de Chaux, placée sous le vocable de Saint-Martin, est l’une des plus anciennes du département, citée dès le XIII » siècle. Le bâtiment a subi de nombreuses modifications. notamment aux XVII et XVIIIe siècles mais la base du clocher est médiévale. L’église Saint-Martin renferme un mobilier intéressant. La chaire en bois due à un artiste de Delle date de 1765. Elle est classée monument historique depuis le 28 décembre 1973. De même la grille du choeur en fer forgé, installée en 1770 est classée depuis le 23 juin 1983.
L’église et son mobilier ayant subi les atteintes du temps, des travaux s’avéraient nécessaires. En 1988 la toiture du clocher est refaite par la municipalité. En septembre 1990, à l’initiative de l’abbé Ménecier, qui dessert la paroisse, l’Association d’éducation populaire Saint-Martin de Chaux est créée, son objectif étant la restauration de l’édifice. La réfection de l’orgue est entreprise. L’instrument, fabriqué en Allemagne, installé en 1947 , comprend dix jeux. Il est confié à un facteur d’orgues local, monsieur Raymond-Dominique d’Autrechêne. Le premier concert peut être donné le 13 octobre 1990 sur l’orgue rénové.
L’année suivante les peintures du choeur et de la nef sont refaites et en 1992 l’étude de la réfection des vitraux est entreprise par l’atelier Fabien Schultz de Burnhaupt-le -Haut. Les premiers travaux sont engagés dès 1992. Ils se poursuivront jusqu’à remise en état des quatre vitraux du chæur et des huit vitraux de la nef.
Outre les subventions des collectivités l’association fait de gros efforts pour réunir les moyens financiers nécessaires. Elle a édité un pin’s, une carte postale et surtout organise des manifestations, notamment des concerts, qui permettent également de mieux faire connaître cette église qui fut jadis un des principaux édifices religieux de notre région.
Pour en savoir plus :
- Schouler (Georges), Histoire de Chaux, Société belfortaine d’émulation, 1991.
- Schouler (Georges), André Chabiel de Morière, La Vôge n°3, 1989,
- Liebelin (François), Réfection de la toiture du clocher historique de Chaux, La Vôge, 1988.
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