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Édito

Comme il le dit lui-même, Germain Lambert aurait pu être officier de carrière comme son grand-père paternel, accordeur de pianos et facteur d’orgues comme son grand-père maternel ou bien encore employé aux  Chemins de fer comme l’avait suggéré son père, mais il a préféré la mécanique et mieux encore, construire des automobiles.
Choix peu ordinaire d’un homme pas ordinaire… Germain Lambert a enregistré sa vie dans une autobiographie « Auto Critique Auto », écrite en 1968, publiée sobrement et pudiquement en 1976. Dans cet ouvrage quasi introuvable aujourd’hui (ou à quel prix ?), et homme aussi atypique que génial a tout dit de lui : ses ambitions et ses échecs, ses galères et ses coups d’éclat, ses espoirs et ses déceptions. Il ne s’est pas épargné mais il n’a épargné personne. Non plus. Bref, il s’est décrit comme il a vécu : passionnément !
C’est parce que Germain Lambert fut, à un moment de sa vie – le plus glorieux peut-être – un artisan connu et reconnu de la vie industrielle, commerciale et associative de Giromagny dans le Territoire de Belfort, que nous avons décidé de lui consacrer un numéro spécial de La Vôge.
L’Association pour l’Histoire et le Patrimoine Sous-Vosgiens (AHPSV.), dans sa mission de défense et de préservation de tous les patrimoines, se devait de rappeler qui était Germain Lambert, créateur d’automobiles venu s’établir au pied du ballon d’Alsace, théâtre de tant d’épreuves de sports mécaniques.

François Sellier.

Table des matières

HISTOIRE
D’UNE DESTINÉE
LES BELLES AUTOS
DE LA DÉSILLUSION
INVENTIF
ET INGÉNIEUX
PORTFOLIO
LES LAMBERT
DANS LA COURSE
ÉPILOGUE

HISTOIRE D’UNE DESTINÉE

Dans les pages qui suivent, nous avons choisi de vous présenter Germain Lambert sans trahir son histoire, en le citant souvent, en le suivant pas à pas et avec respect sur le chemin de sa destinée, grâce à son livre
« Auto Critique Auto ». Nous avons gardé l’essentiel de ce qui, à nos yeux, explique tous les choix de cet homme qui a toujours fait preuve d’une énergie inépuisable et d’une volonté créative obsessionnelle, malgré les vicissitudes qui ont jalonné sa vie.
Dans son autobiographie, page 136, Germain Lambert évoque avec nostalgie les 972 constructeurs français ayant existé et promet de faire l’histoire de chacun dans un « grand atlas », avec tous les détails techniques et plusieurs milliers de photographies et de dessins. Il dit y travailler depuis de nombreuses années. Nous ne savons pas, à ce jour, si le travail déjà réalisé a pu être conservé. Souhaitons qu’un jour ce trésor, même inachevé, puisse être mis au jour.
C’est ainsi que, par fidélité à cette idée, nous avons tenu à insérer dans de modestes notes de bas de pages, un bref historique de chaque marque citée.

Franc-comtois d’origine

Si c’est à Giromagny (Territoire de Belfort) que Germain Lambert construit ses dernières voitures, c’est aussi en Franche-Comté qu’il voit le jour. À Passavant, en Haute-Saône, le 31 juillet 1903. Il est le fils de Henri Lambert alors chef de district aux Chemins de fer de l’Est et de Clémentine Mieszczabowsky1.
Tout petit, dans sa Haute-Saône natale, Germain a l’occasion de respirer l’odeur des pneus, de l’huile, du pétrole chez le réparateur de bicyclettes et les vapeurs d’essence et de gaz s’échappant des « boîtes à pets » des rares automobiles qu’il rencontre.
Quand il a quatre ans, à Jussey (Haute-Saône) où ses parents construisent une grande maison, il côtoie les ouvriers du bâtiment, touche à tous leurs outils et se blesse souvent… Grâce à son père, il peut
aussi voir de près les grosses locomotives aux cuivres étincelants et aux bielles superbement polies. C’est comme cela que, dès son plus jeune âge,…

(La suite page 2)

Pris au piège

Grâce aux relations de son père, un emploi à la hauteur de ses ambitions est enfin proposé à Germain Lambert : directeur du tout nouveau « Grand garage moderne » de Mâcon. Le patron lui offre un million de dot et…. sa fille ! Que faire quand le travail s’avère séduisant et la fille pas du tout ? Accepter dans un premier temps, il avisera ensuite… L’établissement regroupe les agences Mathis pour la grande série, Rally31 pour les petites sport et course, Latil32 pour les véhicules industriels, Vermorel pour les voitures de classe et les camionnettes et enfin, Studebaker33 pour ce qui est des voitures américaines (qu’il n’apprécie guère). Du personnel en nombre, des véhicules en vitrine, le garage présent dans les foires expositions avec Germain Lambert comme directeur. La consécration ? Pas vraiment. Il est littéralement séquestré par la famille qui lui offre gîte et couvert, mais pas de salaire. Il est pris au piège et demande son compte. Il n’obtient rien et pire encore, il ne récupère pas son outillage personnel ni le prototype de la « Sans Choc » qu’il avait innocemment amené avec lui. Mais il peut se défaire de la fille…

Du dépit et de la colère

Son passage dans le « Grand garage moderne » lui aura au moins permis de connaître du monde. Ainsi se fait-il prêter des voitures pour sillonner la région et proposer des pièces de bicyclettes, de motos et même les voitures avec lesquelles il fait sa tournée : une Ariès, plusieurs Mathis, une Sigma35 et même une torpédo Berliet. Et tout s’arrête à la fin 1928. « En quelques mois, j’ai perdu tout ce que j’avais gagné. » Germain Lambert ne donne pas la raison pour laquelle ses affaires, pourtant florissantes, se sont
arrêtées brutalement à la fin 1928. Ou plutôt il en donne beaucoup, mais qui ressemblent fortement à du dépit et de la colère. Aujourd’hui, on appellerait ça une dépression. « Les boîtes de grandes séries commencent à tuer les autres, les marques étrangères arrivent. […] L’apparition du cinéma parlant, ainsi que d’autres éléments, transforment l’état d’esprit. […] C’est l’époque du beau qui disparaît, la décadence arrive. Peintures et sculptures idiotes, musiques incohérentes, etc. »  Pensées étranges d’un homme de 26 ans dont les idées progressistes en matière de technicité contrastent fortement avec ce regard très réactionnaire sur la société en marche…

Tours, Reims, nouvelles expériences

Par petite annonce, le patron du « Palais Automobile de Touraine » situé à Tours trouve en Germain Lambert un représentant et un technicien idéal. Germain parcourt les routes d’Indre et Loire au volant d’une 5 CV Vinot-Deguingand37 pour proposer des
modèles de nombreuses marques : De Dion Bouton38, Delauney-Belleville39, Morris-Léon Bollée et Donnet40, Salmson41, Benova42, camions Bernard43, etc. En deux mois, il ne vend que…

(La suite page 11)

…Hélas, le 27 août 1939, tout s’effondre. Germain Lambert est mobilisé. Cinq jours après son départ pour la guerre, son moulin est réquisitionné par l’armée française qui s’approprie les lieux sans ménagement, sans aucun respect pour le matériel.
C’est au sein d’une unité de renseignements qu’il traverse la « drôle de guerre », la débâcle et apprend la signature de l’armistice. Le 28 juillet 1940, il rentre à la maison, retrouve femme et enfant. La maison et
l’atelier ont été pillés, saccagés, mitraillés.
Toutes les voitures ont été vandalisées, sauf la « Sans choc » que Germain Lambert avait pris soin de bien cacher. Tous les animaux ont été sacrifiés. Une semaine d’anéantissement et l’homme se relève. Raison supplémentaire pour se remettre au travail : la naissance de son second fils, Guy, le 23 août. Une importante commande de matériel pour scierie arrive providentiellement. La matière première manque. Il doit chercher de l’acier à Paris. L’opération relève de la tragi-comédie : imaginons Germain Lambert dans le métro, dans le train et dans le bus, trimballant ses barres d’acier de deux mètres de long…
Les machines tournent à plein rendement, nuit et jour. Et une nouvelle idée se met à germer. En ces temps de guerre, seules les voitures équipées d’un gazomètre sont autorisées à circuler. Pourquoi ne pas construire une voiturette électrique ? Deux prototypes sont mis en chantier et vendus (voir chapitre sur les voitures Lambert). Le mécontentement des deux clients met un terme à la fabrication de la voiturette électrique.

Les moulins à farine du renouveau

L’échec des véhicules électriques n’entrave pas le regain d’activités de Germain Lambert. Il doit même embaucher. Des réfractaires au STO76 font l’affaire, pourtant le risque est grand. Et voilà qu’on lui demande de fabriquer des moulins à farine. Une activité clandestine qu’il faut cacher dès que la porte de l’atelier s’ouvre à un inconnu. Parallèlement, il fabrique de manière très officielle des étaux de précision et des perceuses à colonne et à têtes multiples. Quant à la fabrication des moulins à farine, elle peut être
considérée comme un acte de résistance, en permettant de moudre des dizaines de tonnes de farine à l’insu de l’occupant.
1944, la Libération. Les ouvriers français partent, remplacés par des prisonniers allemands. Au nombre de six, ils doivent être initiés, mais, pleins de bonne volonté, ils donnent vite satisfaction.
1946. Les affaires vont bon train mais Germain Lambert se sent à l’étroit dans son « moulin ». Dix ans au même endroit. Cela ne lui était jamais arrivé ! Il lui faut trouver un ailleurs plus vaste, plus moderne, moins excentré. Son regard se porte du côté de Belfort, région d’origine de sa mère, et qu’il a habitée un temps, dans son enfance. C’est à Giromagny, à 13 km au nord de Belfort, qu’il trouve son bonheur.

La petite ville du bonheur

C’est dans une belle propriété de trois hectares, avec maison de maître, parc, ateliers, que la famille Lambert s’installe, rue de Rougegoute à Giromagny. Appartenant auparavant à M. Paul Warnod, ce site était occupé depuis 1914 par une petite entreprise de boissellerie dans laquelle étaient fabriqués des peignes pour les métiers à tisser. Si l’achat est signé le 6 juin 1946, Germain Lambert et son équipe doivent…

(La suite page 19)

La « 16 » et le type « CV »

Ce coup dur frappant l’activité de mécanique générale incite Germain Lambert (mais a-t-il vraiment besoin d’être incité ?) à persévérer dans la construction automobile.  C’est une auto exclusivement destinée à la course qui est mise en chantier. Elle est entièrement conçue en aluminium et en duralumin. La coque formant châssis est réalisée en tôle de dural de 4 mm d’épaisseur. Le système classique d’un essieu et pont rigides avec ressorts à lames est adopté. La voiture est terminée juste
à temps pour l’engager au Bol d’Or qui se dispute les 5 et 6 juin 1949 sur le circuit de Montléry. Pour cette épreuve, la voiture porte le n° 16, on l’appellera donc tout naturellement la « 16 ». Ce prototype de course promet. À son volant, Germain Lambert termine troisième de sa catégorie (1100 cm3) et dixième au classement général.
La course automobile a toujours été la meilleure vitrine des constructeurs. La marque Lambert n’échappe pas à la règle, sa prestation au Bol d’Or 1949 a attiré l’attention. C’est pourquoi un nouveau modèle, dérivé du précédent, est mis en chantier : le type « CS ». Moins coûteux à construire et plus confortable, il est muni d’un châssis multitubulaire sur lequel il n’y a plus qu’à poser les carrosseries qui sont exécutées par les frères Schmitt à Colmar. Les équipements diffèrent suivant les modèles produits, la motorisation est adaptée aux performances recherchées. Quoi qu’il en soit, il s’agit toujours d’un moteur Ruby de 1100 cm3 remis « à la sauce Lambert ». (G.L. avait pris soin de racheter le stock à Georges Irat – voir encadré moteur Ruby).
Le type « CS » sera décliné en modèles « Grand Sport Populaire », « Sport Luxe décapotable » avec carrosserie Luxor ou Simplitia, et « Modèle course » avec roues « Rudge »93, pneus de course et moteur réalésé permettant d’atteindre les 150 km/h.
Quelques véhicules se vendent, mais l’arrêt de la production des moulins à farine pèse énormément sur la trésorerie des établissements Lambert. Malgré tout, fin 1951, un modèle sort encore des ateliers de Giromagny : la « Torino type CS ». Avec sa carrosserie en dural (réalisée par les frères Schmitt de Colmar) et son moteur 1500 cm3 à compresseur, elle a comme un petit air de Ferrari… C’est sans doute la Lambert la plus aboutie. Hélas…

(La suite page 26)

LES BELLES AUTOS DE LA DÉSILLUSION

Du premier châssis sans choc de 1926 au superbe coupé Torino de 1951, il n’est pas simple de répertorier tous les modèles créés par Germain Lambert. Certains châssis ont été déclinés avec des carrosseries différentes, comme cela était souvent le cas chez les constructeurs indépendants. Dans un excellent article paru dans Classique & Sports Car n° 2 – septembre 2012, MM. Serge Cordey et Guy Lambert recensent 18 véhicules (prototypes et modèles commercialisés). À n’en pas douter, ils ont raison.
Guy Lambert, fils cadet de Germain, a longtemps oeuvré pour la préservation de ce qui a pu être conservé de la marque. Aujourd’hui, grâce à lui, grâce à la Fondation du Patrimoine, grâce à M. Pund, grâce à la Société Motul, quatre véhicules Lambert sont déposés au Musée national de l’automobile de Mulhouse, de même qu’un fonds d’archives techniques et iconographiques.

1946/1953 – Giromagny. La « 6 CV type SA » – 1948.

  • Châssis monocoque et carrosserie en
    acier.
  • Propulsion : pont Lambert.
  • Moteur Ruby-Lambert, 4 cylindres en ligne, 1087 cm3.
  • Embrayage mono disque à huile.
  • Suspension à quatre roues indépendantes par système à ressorts et coulisses hydrauliques à débattement vertical.
  • Freins à tambours de grand diamètre sur les quatre roues.
  • Roues à rayons Robhur.
  • Deux châssis prévus : type SA
    (châssis acier), type SD
    (dural – non réalisé ?).
  • Vitesse 120-125 km/h en version acier. Pneus 12 x 45.

 Cette voiture fut présentée au Salon de Paris 1948, avec des ailes avant et arrière très enveloppantes qui seront abandonnées ensuite. La particularité de ce modèle réside dans le fait que capot et ailes avant peuvent être levés à la verticale en un seul bloc, facilitant l’accès direct à la mécanique. À son volant, G. Lambert participe au Bol d’Or 1948, mais n’est pas classé.

Ce véhicule se trouve aujourd’hui au Musée de l’automobile de Mulhouse.

 (La suite page 40)

1951. Type CS Sport-luxe décapotable « Simplicia ».

INVENTIF ET INGÉNIEUX

À l’âge de seize ans, Germain Lambert est (déjà) un chercheur, un rêveur, un concepteur dans l’âme… Il dessine un moteur sans soupapes par boisseaux, une torpédo, une machine à vapeur, un autre moteur à explosion avec pistons à double effet et distribution également par boisseaux, et même un trusquin à glissières pour le traçage des longues pièces.

À dix-sept ans, il voit encore plus loin. Il envisage tout bonnement de construire un moteur à nitroglycérine ! Son professeur de mécanique lui conseille alors de prévoir des parois épaisses… Il commence à étudier une turbine à explosions et dessine même un sous-marin équipé de quatre de ses turbines accouplées.

21 octobre 1930

Brevet d’une « Suspension par roues indépendantes pour automobiles et autres véhicules ». C’est le brevet du système « Sans choc ».

Résumé :
Cette suspension présente les avantages suivants :

  • Indépendance totale des roues.
  • Simplicité de construction.
  • Tenue de route améliorée en virages pris à grande vitesse.
  • Centre de gravité très bas.
  • Possibilité de pinçage et de carrossage des quatre roues.
  • Suppression de l’essieu avant et des amortisseurs. Gain de poids.
  • Elle est caractérisée par son…

(La suite page 51)

PORTFOLIO

27 photos dont plusieurs n’ont jamais été publiées.

La future « 16 » sortie des ateliers de Giromagny
(Coll. Raymond Dornier)

Carénage de calandre de la « 16 » 1951.
Photo Thierry Marline

LES LAMBERT DANS LA COURSE

Depuis la naissance de l’automobile, la course est le support publicitaire majeur des constructeurs. Elle a été inventée pour cela. Aucune grande marque ne s’y est soustraite. De même que les nombreux « petits » fabricants, concepteurs, ingénieurs qui fleurirent au cours de la première moitié du XXe siècle. Germain Lambert présente sa première « Sans Choc » lors du 8e Grand prix de la Marne, sur le circuit de Reims-Gueux le 2 juillet 1933, en servant de pace car (ou safety car) comme on dirait aujourd’hui.
Mais c’est en course que la marque Lambert va s’illustrer et notamment au cours du mythique Bol d’Or, même si cela a coûté très cher et rapporté peu…

Le Bol d’Or, un truc de fous

Le Bol d’Or était une course d’endurance autos et motos de 24 heures. Créée en 1922, un an avant les 24 Heures du Mans, l’épreuve se déroulait traditionnellement le week-end de Pentecôte, donc sur trois jours, les autos succédant aux motos.
Disputée d’abord sur le circuit « des Loges » en forêt de Saint-Germain-en-Laye, l’épreuve s’expatrie à Montlhéry de 1937 à 1939. La compétition reprend en 1947 mais à nouveau à Saint-Germain, pour cause de travaux sur le circuit de Montlhéry. De même en 1948. En 1949 et 1950, le Bol d’Or retourne à Montlhéry, mais le public boude l’épreuve : loin de Paris, accès difficile… En 1951, la course a donc lieu, à nouveau, à Saint-Germain, mais pour la dernière fois. Toutes les éditions suivantes, jusqu’en 1960, se dérouleront à Montlhéry. Certes, les mécaniques sont mises à rude épreuve durant 24 heures, mais que dire des pilotes ? Contrairement aux 24 Heures du Mans, c’est le même pilote qui reste au volant pendant toute la course.Si une panne survient sur le parcours, seul le pilote peut intervenir ou faire l’aller-retour à pied pour chercher la pièce à remplacer. Pire, s’il peut ramener la machine jusqu’à son stand en la poussant, il lui est interdit de revenir en arrière. En clair, si la panne se produit peu après les stands, le pilote doit pousser son auto dans le sens de la marche, sur plus de six kilomètres… Dément !

Les Lambert au Bol d’Or

C’est en 1948, sur le circuit de Saint-Germain, que Germain Lambert participe à son premier Bol d’Or, au volant de la toute nouvelle 6 CV portant le numéro 12. Il a pris soin d’ôter les portières et de changer le capot enveloppe des ailes avant. Il n’est pas classé, n’ayant pu parcourir une distance suffisante, mais il se paie le luxe de « doubler en pleins virages les Simca-Gordini, beaucoup plus rapides que [lui] en ligne droite. »
À l’arrivée, Germain Lambert est tellement épuisé qu’il fait un malaise. Il faudra l’aide du médecin de la course et…

(La suite page 66)

… En 1950, la « 16 » porte… le numéro 15. Comme beaucoup de pilotes, Germain Lambert ressent la fatigue, particulièrement au petit jour et surtout au cours des derniers tours de course, en fin d’après-midi. Il n’a plus que trois tours à parcourir, soit 18 km, il n’en peut plus, souffrant de la soif, de la chaleur, le dos rompu [N.D.A. : il faut avoir vu de près la « 16 » et jugé la position de conduite pour imaginer le calvaire que pouvait endurer le pilote assis dans un tel engin, vingt-quatre heures durant, et par n’importe quel temps]. Il veut arrêter. « Je suis troisième, ça va comme ça. » dit-il à son équipe en s’arrêtant au stand. Ses amis refusent et l’obligent à repartir. À chacun des deux tours suivants, il s’arrête à nouveau et repart, contraint par les mêmes. Merci, les amis !
Le concurrent qui le précède casse, Germain Lambert termine deuxième de la catégorie 1100-course ! En 1951, bref retour sur le circuit « des Loges » à Saint-Germain-en-Laye. Germain Lambert est engagé sur… la 17. Son ami Marcel Chotin, agent Panhard à Lure, court sur le roadster CS Grand-sport et porte le numéro 32. C’est pour ce Bol d’Or 1951 que le carénage de calandre et le carter de bras sont installés sur la voiture de course. Germain se classe troisième en classe 1100-course, tandis que Marcel termine deuxième de la classe 1100-sport !
En 1952, comme l’année précédente, deux Lambert sont engagées. La « course » pour Germain, le roadster CS pour Marcel. Mais avant le départ, le « patron » souffre de maux d’estomac et laisse le volant de la « 16 » (qui a retrouvé son numéro) à Marcel Chotin. La course est particulièrement difficile. Sur les 33 voitures au départ, seules 12 terminent. C’est compliqué aussi pour la Lambert. Alors qu’il vient de faire le plein de carburant, Chotin rentre au stand, littéralement inondé d’essence. En quelques secondes, les 40 litres finissent de se répandre sur l’aire de ravitaillement. En un temps record, Germain Lambert et son équipe démontent le réservoir, le ressoudent, le remontent. Une heure de perdue… devant un public admiratif d’un tel dépannage.
Et Chotin gagne la classe 1100-course ! C’est la première victoire d’une Lambert au Bol d’Or.

(La suite page 69)

ÉPILOGUE

Germain Lambert était un inventeur.
Il voulait ses voitures confortables, sportives et personnalisables. En cela, il fut un précurseur, mais un précurseur incompris. Pourquoi ?

  • Était-il trop inventif ?
  • Était-il trop ambitieux ?
  • Était-il mauvais gestionnaire ?
  • Était-il prisonnier de ses certitudes ?
  • Était-il trop en avance sur son temps ?
    Peut-être tout cela à la fois. Ou pas…

En tout cas, aujourd’hui comme hier, Germain Lambert ne laisse jamais indifférent quiconque s’intéresse à l’automobile.
Que ce soit à Parly où il a fini ses jours, à Giromagny où une rue a été baptisée à son nom et une plaque apposée sur ses anciens ateliers, dans les rencontres « d’Anciennes » où certaines de ses voitures sont apparues régulièrement, dans la presse spécialisée et sur Internet où l’on ne compte pas les articles ou autres blogs qui lui sont consacrés : le nom de Lambert demeure ! Mieux encore, quatre de ses véhicules ont été reconnus « d’intérêt patrimonial majeur » par l’État en 2012, et se trouvent aujourd’hui au Musée de l’automobile à Mulhouse.
Puisse cette édition spéciale de La Vôge contribuer elle aussi à inscrire Germain Lambert au Livre d’or des créateurs libres de l’automobile !

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