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MINES ET MINEURS DU ROSEMONT // François Liebelin

Quelques extraits

Chapitre I, page 27

LES HABSBOURG SEIGNEURS DE BELFORT ET ROSEMONT

Origine de la Maison de Habsbourg

Cette dynastie régna sur l’Autriche de 1278 à 1918. Elle tire son nom du château d’Habichtsburg (par corruption Habsbourg) construit vers 1020 en Suisse (canton d’Argovie).

La constitution du domaine, la puissance des Habsbourg en Europe

La famille de Habsbourg accéda à l’Empire avec Rodolphe 1er en 1273 et acquit en 1278 les duchés d’Autriche, de Styrie et de Carniole. Les Habsbourg acquirent ensuite la Carinthie (1335), le Tyrol (1363) et, sous Léopold III, Fribourg (1368), Trieste (1382), le Vorarlberg, etc. La maison de Habsbourg donna à l’Allemagne les empereurs Albert II. Frédéric III (1440-1493) et, sauf une exception (de 1740 à 1745), tous les empereurs allemands furent choisis dans la famille jusqu’en 1806, fin du Saint Empire Romain Germanique. Les Habsbourg augmentèrent leur puissance par leur politique de mariages : mariage de Maximilien 1er avec Marie de Bourgogne (1482), mariage de Philippe le beau avec Jeanne la folle, héritière de l’Aragon et de la Castille (1496) qui lui apporta l’Espagne et Naples (1506-1516) ; mariage de Ferdinand 1er avec Anne qui lui apporta la Bohême et une partie de la Hongrie (1526). L’apogée de la Maison de Habsbourg eut lieu sous Charles Quint, mais ce dernier donna ses Etats autrichiens à son frère Ferdinand 1er, ce qui eut pour conséquence la naissance de la ligue espagnole (Espagne et Pays-Bas, etc.)

Incorporation de la Seigneurie du Rosemont aux domaines autrichiens

En 1282, le Comté de Montbéliard dont relevaient les seigneuries de Belfort et Rosemont échut à Renaud de Bourgogne, époux de Guillaumette de Neuchâtel, héritière des Montbéliard. Ce seigneur est resté célèbre par la charte qu’il accorda à la ville de Belfort en 1307. L’administration qu’il institua à Belfort resta chargée du « gouvernement » du Rosemont sous la direction d’un «Lieutenant», choisi par le gouverneur de Belfort auquel le comte déléguait ses pouvoirs. Renaud de Bourgogne avait trois enfants : Othenin son seul fils étant faible d’esprit resta sous tutelle sa vie durant, Agnès sa fille aînée épousa de Montfaucon, Jeanne la cadette Ulrich II, comte de Ferrette. A la mort d’Ulrich II, le 17 mars 1324, Jeanne de Montbéliard héritière d’un tiers du domaine de son père (Renaud de Bourgogne), abandonna cet héritage à son futur gendre, le Duc Albert d’Autriche pour la somme de 2.700 marks d’argent. Le jour même jour, Albert prenait le titre de Comte de Ferrette. Le 26 août 1347, les quatre filles de Jeanne de Montbéliard, Jeanne épouse d’Albert d’Autriche, Ursule épouse du comte Hugues de Hohenberg, Marguerite, épouse de Frédéric, marquis de Bade et Adélaïde, épouse de Rodolphe, marquis de Bade, procédèrent au partage de leurs biens, avec le consentement de leur mère. Le lot de Jeanne de Ferrette, duchesse d’Autriche, comprenait la terre du Rosemont.

Nomenclature des Habsbourg Seigneurs des « pays antérieurs » donc de la terre du Rosemont

Albert le Sage (1347-1358)
Dans les années qui suivirent le partage de 1347, Albert d’Autriche acquit successivement de ses belles-sœurs, les filles de Jeanne de Montbéliard, les parts de l’héritage des comtes de Ferrette et les réunit aux vastes domaines que sa famille possédait depuis longtemps dans la Haute-Alsace. Tous ces domaines formèrent une province qui pendant près de trois cents ans porta le nom d’Autriche antérieure.

Léopold II (1365-1386)
Il affranchit du droit de mainmorte les habitants du Rosemont vers 1370. Il acquit aux Habsbourg la ville de Fribourg-en-Brisgau en 1368, Trieste en 1382 et une partie du Vorarlberg. Il fut vaincu et tué par les Suisses à la bataille de Sempach le 9 juillet 1386.

Albert (1386 vers 1390)
Frère de Léopold II, tuteur des deux fils de ce dernier, administre les possessions alsaciennes pendant quelques années. C’est le premier prince autrichien à s’être intéressé aux mines de notre région ; en effet le 31 août 1387 il signe une convention permettant à l’abbaye de Masevaux de continuer à exploiter les mines d’argent du secteur sous certaines conditions.

Léopold III (dit le superbe) (vers 1390-1411)
Il épousa en 1393 Catherine de Bourgogne, fille de Philippe le Hardi à qui il donna les terres landgraviales de la Haute-Alsace et en 1407 lui accorda l’administration et l’usufruit du langraviat ainsi que la collation des fiefs. Lorsqu’il mourut à Vienne en 1411 , Catherine de Bourgogne entra alors en possession pour sa vie durant des terres et châteaux de Belfort et Rosemont…

Catherine de Bourgogne (1411 -1425)
Elle confirme les privilèges de Belfort en 1412-13 et 1424.
Jean Guillaume de Chaux : châtelain du Rosemont était alors receveur de Belfort, Rosemont et l’Assise.

Frédéric II (1425-1439)
Son règne est marqué par les atrocités commises par les « Écorcheurs » qui, sous les ordres du dauphin de France le futur Louis XI, envahissent et ruinent le pays.

Sigismond 1er (1439-1469)
Lorsque Frédéric II mourut, son fils Sigismond lui succéda. Comme il était mineur, il eut d’abord pour tuteur son cousin germain Frédéric le Pacifique qui, en 1441, devait devenir empereur d’Allemagne et roi des Romains, puis son autre cousin Albert le Prodigue. Sigismond 1er en 1467 confirme l’exemption de droits de mainmorte, accordée aux sujets du Rosemont par Léopold le Bon vers 1370.
Sigimond possesseur exclusif des terres de l’Autriche antérieure avait des dettes énormes. Il devait beaucoup aux Bâlois et à divers seigneurs. Pour garantir leur créances, il leur avait engagé non seulement le Rosemont, mais encore la plus grande partie de ses domaines d’Alsace.

Pierre de Moersperg (Morimont) était un zélé courtisan de l’archiduc, ce fut lui qui traita avec le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, pour lui vendre, avec droit de rachat, toutes les possessions de la maison d’Autriche dans la Haute- Alsace et le Brisgau. Le marché fut conclu à Saint-Omer les 2 et 9 mai 1469, pour une somme de 50.000 florins.

Charles le Téméraire (1469 – 1475)
Le rachat de l’Autriche antérieure lui permettait de réaliser partiellement un vieux rêve, c’est-à-dire de réunir les deux tronçons encore séparés de ses domaines de Franche-Comté et des Pays-Bas. Il ne lui restait plus qu’à s’approprier la Lorraine.
C’est sous le règne de ce seigneur bourguignon qu’il est pour la première fois question d’une exploitation minière dans le Rosemont. En 1470-71 le Téméraire essaie de s’emparer des mines de Plancher appartenant à l’abbé de Lure. Une transaction a alors lieu entre son bailli Pierre de Hagenbach et le prince abbé. L’année suivante (1472) un contrat d’exploitation des mines d’Auxelles est passé entre les conseillers de la chambre archiducale de Dijon et deux bourgeois de Vesoul.
Sigismond d’Autriche se repentit vite de son marché et se rapprocha des Suisses. On peut penser qu’il leur promit entre autres avantages l’exclusivité des concessions minières s’il réussissait à récupérer ses anciennes possessions alsaciennes. Toujours est-il qu’il trouva la somme nécessaire au rachat de l’Autriche antérieure et ce rachat fut signifié à Charles le Téméraire le 6 avril 1474. En janvier 1477, le Bourguignon trouvait la mort au cours du siège de Nancy.

(Fin de l’extrait du chap. 1)

Chapitre 3, page 77

LA PROSPECTION MINIÈRE

Dans les monts métallifères

La détection des filons minéralisés était faite à l’aide de baguettes fourchues appelées « baguettes divinatoires ». Agricola, sur l’utilité de ces baguettes, s’explique de la manière suivante :

«…De ceux qui croient à la vertu de la baguette, les uns coupent une branche fourchue de coudrier qu’ils pensent être meilleure que les autres pour la découverte de la veine (filon), surtout si l’arbre a poussé sur quelque filon ; d’autres, en raison de la variété des métaux, emploient pour les découvrir des verges de diverses espèces de bois, pour l’argent des branches de coudrier, de frêne pour le cuivre, de sapin pour le plomb etc. Il est nécessaire que leurs poings fermés soient tournés vers le ciel, de façon que la partie de la verge où se réunissent les « cornes » se trouve en haut. Alors ils se promènent par les montagnes et ils prétendent que dès qu’ils ont posé le pied sur une veine, la baguette se courbe et s’agite, redevient immobile s’ils retournent sur leurs pas. Ils disent que la force du filon fait mouvoir leur baguette et que cette force est telle qu’elle fait courber les branches des arbres qui croissent dans les environs. Il faut que la baguette ne soit pas tenue trop doucement car elle tomberait avant la découverte de la veine, ni avec trop de raideur, parce que la force déployée par la main pourrait être plus grande que l’attraction de la veine… » .

À Sainte Marie-aux-Mines en 1602

Prechter nous dit :

« Au début, quand on entrevoit la possibilité d’établir une exploitation minière, que ce soit grâce au fait que des filons « Gänge » et des failles « Klüfte » affleurent au jour, qu’ils soient lavés par les pluies, mis à découvert par la chute des arbres déracinés, que l’on découvre l’indice détaché d’un filon en cultivant les champs, qu’ils soient décelés avec des baguettes divinatoires ou fouillés de quelque autre manière, au début donc il est nécessaire de reconnaître soigneusement les directions de ces filons et le côté vers lequel ils ont leur pendage ; aux endroits où cela est possible, on doit pratiquer des fouilles au jour et y établir des travaux… ».

À Giromagny au XVIIè siècle

Domilliers dans son mémoire de 1661, après avoir brossé un tableau sommaire de la situation des mines du Rosemont, nous explique de quelle manière on prospectait les montagnes et quels étaient les instruments utilisés à Giromagny. «… II y a quantité de mines d’argent, cuivre et plomb en la Seigneurie de Rosemont et particulièrement en la montagne près de Giromagny, Lepuix et Auxelles dont il est fort difficile de bien découvrir les filons attendu qu’ils sont presque au centre de la terre et que les ouvriers qui y travaillent sont si stupides, grossiers et ont tant de termes particuliers  qui sont compris dans leur jargon, mais il est impossible d’en tirer de grands éclaircissements. Néanmoins j’ai eu souvent à faire et longtemps conversé avec eux, j’ai même réglé plusieurs difficultés qui se sont rencontrées avec les amodiateurs. Ainsi j’ai appris qu’il y a cinq règles méthodiques qu’il faut savoir pour connaître les lieux où ‘croissent’ les métaux :

  1. Par l’ouverture de la terre, c’est la règle la plus sensible et la moindre.
  2. Par les herbes et plantes qui croissent dessus (les filons).
  3. Par le goût des eaux qui en sortent ou que l’on trouve dans les « nappes» de la terre.
  4. Par les vapeurs qui s’élèvent autour des montagnes et vallées a l’heure du soleil levant.
  5. La dernière par le moyen de 16 instruments métalliques et hydrauliques qui s’appliquent dessus.

En plus de ces règles et des 16 instruments, il y a encore 7 verges métalliques dont la connaissance et la pratique est nécessaire. Desquelles règles les anciens se sont servis pour découvrir de la superficie de la terre les métaux qui sont dedans, leur profondeur et savoir si les mines sont pauvres ou riches en métal, comme aussi pour découvrir la source des eaux avant d’ouvrir la terre, savoir si elles sont abondantes et le lieu de leur penchant (plus grande pente) est propre à faire tourner les moulins, les roues, jouer les soufflets, laver les mines et autres manufactures nécessaires aux officiers des mines, afin qu’à moindre frais, moins de labeur et de temps l’on puisse mener l’entreprise à bonne fin.
Ces verges sont appelées et nommées dans les mines de Trente (Italie) et du Tyrol (Autriche), en langue italienne et vulgaire : Verga lucente, Verga cadente, Verge salente, Verga batente, Verga trépidante etc, lesquelles verges se doivent fabriquer le ciel étant à telles heures et minutes que les astrologues marqueront et désigneront et qui ne sont point de notre fait.
Je dirai seulement que :

  • Verga lucente sert pour reconnaître les mines d’or…
  • Les grandes boussoles à 7 angles et Verga cadente pour trouver les mines d’argent
  • L’astrolabe minéral et Verga salente pour trouver les mines de cuivre…
  • Le cadran minéral et Verga batente pour trouver l’étain…
  • Le géométrique minéral et Verga trépidante à rechercher de la surface de la terre les mines de plomb, d’antimoine.
  • Le râteau métallique et Verga cadente pour connaître les mines de fer, etc.

Et plus loin Domilliers explique comment les anciens fabriquaient les baguettes divinatoires.
« …Les anciens qui se sont exercés à la science des eaux et ont recherché tous les secrets pour
trouver les sources des puits et fontaines, comme aussi les soldats pour trouver les caches et les lieux où étaient l’or, l’argent et autres métaux que l’on avait cachés dans la terre, les puits ou dans les rivières, se sont servis du premier rejeton fourchu du bois de coudre (ou noisetier), lequel par une vertu occulte s’incline et s’abaisse sur les lieux où sont les sources des eaux et sur les métaux qui sont dans la terre et dans les eaux,etc… ».

LES PROCEDES D’EXTRACTION

Avant l’utilisation de la poudre

Prechter dans son fameux rapport de 1602 met l’accent sur les procédés d’extraction en usage en Alsace avant l’emploi de la poudre. Les relations entre les secteurs miniers du Rosemont, de Masevaux, du Val de Villé, du Val de Lièpvre ont toujours été très étroites. Ce qui était valable pour une mine l’était pour les autres. D’ailleurs l’archiduc Ferdinand II à maintes reprises conseille aux entrepreneurs de Giromagny de s’inspirer des méthodes pratiquées au Val de Lièpvre pour obtenir de meilleurs résultats.
« …Le mineur (Haüer) qui a devant lui au bout d’une galerie (Ort), un filon avec une traînée dans la hauteur, vers le bas ou par devant, l’entaille de part et d’autre, au « toit » et au « mur » aussi profondément qu’il le peut, et déblaie la roche ainsi abattue. Ensuite il abat le filon et sépare le minerai du stérile, jusqu’à ce qu’il ait terminé sa journée ou qu’il veuille préparer les minerais. Alors il les fait acheminer à l’extérieur par des manoeuvres. Si le filon est morcelé, il doit abattre, déblayer et faire acheminer l’ensemble du minerai (non trié)… ».

(Fin de l’extrait du chap. 3)

Chapitre 5, page 159

LES FONDERIES

Les premiers travaux miniers du XIIè siècle avaient, à n’en pas douter, nécessité la construction de fours rudimentaires destinés à extraire le métal du minerai. Quant à leurs emplacements, faut-il les situer à proximité des mines et des forêts, ou carrément dans les vallées des rivières Savoureuse et Beucinière ? Nous pencherons plutôt pour la première hypothèse puisque l’énergie hydraulique n’était pas encore parfaitement maîtrisée, les soufflets étant mus uniquement par la force de l’homme. La construction de véritables usines fonderies-éprouveries-affineries, n’intervint vraisemblablement pas avant le XIVe siècle, d’abord à Masevaux puis Plancher-les-Mines et plus tardivement au pied du Ballon d’Alsace.

La fonderie de Malvaux

Située à Malvaux (en Mallevaulx sous Ballon) en 1563, date à laquelle les documents commencent à la mentionner, elle a une activité dont nous ignorons l’importance.
Gabriel Hillensohn, écuyer, grand bailli de Guebwiller et Jean Straub, sont propriétaires de cette usine en 1587. Ils la revendent à la société Stadion le 3 septembre 1591 pour une somme de 15 013 livres. Les comptes de l’administrateur Mathias Grembster (1590-94) la qualifient de « schmelzhutte alten », vieille fonderie, sans doute par opposition aux autres plus récentes.
Une dernière mention est faite en 1600. Le manque de documents ne permet pas de dater avec précision la disparition de cet établissement. Il semble qu’en 1632 il n’existait déjà plus depuis un certain nombre d’années. Une restructuration de l’entreprise des Stadion aurait nécessité la transplantation du haut-fourneau à Lepuix-Gy où se trouvait la principale fonderie.

La fonderie des Stadion

Construite dans la vallée de la Beucinière au lieu-dit Chauveroche, à l’ouest du village de Lepuix-Gy, au pied de la montagne « Eichberg » (Chênois actuel). Son emplacement supposé serait celui occupé ensuite par un moulin, puis dès 1829 par le tissage mécanique de la « Jargogne ». Ce choix lui permettait d’utiliser une chute d’eau assez importante. C’était peut-être la fonderie la plus ancienne de tout le district puisque les mines voisines du « Magierberg » (montagne Saint Guillaume) semblaient être considérées comme les plus productives du secteur au milieu du XVIe siècle, avant l’exploitation industrielle du Teutschgrund et Pfennigthurm.
En 1578, le grand bailli de Belfort, Jean Ulrich de Stadion, obtenait la permission d’établir une forge à Oberbruck et la concession exclusive de toutes les mines de la vallée de Masevaux. Dès 1584, il exploitait conjointement avec le prévôt des mines de Giromagny (Melchior Höher), la mine des Trois-Rois au Thillot.
Enfin en 1590, les Stadion, pour la société qu’ils viennent de fonder la « Stadion’schen Schmelzwercks Konsorten », demandent le privilège du libre achat de minerais dans toutes les vallées vosgiennes ayant trouvé, affirment-ils, un nouveau procédé leur permettant d’extraire l’argent des minerais contenant même moins d’un lot d’argent par quintal (environ 0,03 %). A cette date (1590), ils sont propriétaires de la fonderie d’argent de Chauveroche ; l’ont-ils reconstruite ou réaménagée, nous ne le savons ? Toujours est-il qu’elle leur parait bien insuffisante puisqu’ils rachètent le 21 septembre 1591 deux autres fonderies à Lepuix.
Cette usine, citée pour la dernière fois en 1622 , époque où toutes les exploitations minières vosgiennes éprouvent des difficultés sans cesse croissantes, disparaît peu après.

La fonderie bâloise

La compagnie bâloise (Gesellschaft), détentrice depuis 1530 de nombreuses concessions à Auxelles-Haut (montagne la Suisse), à Lepuix-Gy (mines Saint Georges im Teutschgrund) et surtout Saint Pierre au Montjean, possédait aussi sa propre fonderie de cuivre dénommée la « Baselerische schmelzenden gewerken » (fonderie des concessionnaires bâlois). Elle est mentionnée pour la première fois en 1590.
Le livre de comptes de Grembster, administrateur des fonderies des Stadion, montre des relations amicales entre les responsables des fonderies autrichiennes et Georges Cristag ; l’administrateur de l’usine bâloise. En 1591 par exemple c’est 134 cuveaux (environ 6700 kg) de cuivre en provenance du Teutschgrund qui, avec l’accord de Grembster sont dirigés vers le haut-fourneau bâlois. Cette usine s’est spécialisée dans la fonte et l’affinage du cuivre envoyé à l’atelier monétaire de Bâle ou acheté par des marchands suisses, elle concurrençait pas ou très peu les fonderies des Stadion axées sur la production de l’argent dirigé vers l’atelier monétaire d’Ensisheim. Construite vraisemblablement après 1550 près de la principale mine bâloise (Saint Pierre au Mont-Jean), son emplacement est parfaitement localise (filature Schaeffer-Impression, construite par la firme Boigeol-Japy en 1856-57). Cette fonderie utilisait pour les soufflets de son haut-fourneau et affinerie une ou plusieurs roues hydrauliques alimentées par un grand canal de plus d’un kilomètre de longueur, lequel prenait naissance a la hauteur du pont de Lepuix, ce même canal se prolongeait ensuite jusqu’aux deux roues de Saint-Pierre (81). On peut situer son abandon vers 1633-34 car, à l’arrivée des hordes suédoises, les derniers entrepreneurs bâlois se retirèrent prudemment dans leur pays.

La fonderie autrichienne (1565-1730)

Le 30 août 1565, le grand bailli de Belfort transmet à la Régence d’Ensisheim une lettre de doléance du nommé Jean-Pierre Chassignet de Lepuix, lequel se plaint que les mineurs du Teutschgrund ont construit une nouvelle fonderie sur sa propriété. Il réclame une indemnité en contrepartie de la perte subie. S’agit-il d’une expropriation effectuée à l’occasion de la construction de la fonderie dite « autrichienne », hypothèse qui se trouve d’ailleurs confirmée par le rapport de 1566 établi par deux « commissaires» envoyés d’Innsbruck ? On y lit :
« Nous avons inspecté une petite fonderie construite depuis peu, laquelle possède deux fourneaux … les difficultés rencontrées par les fondeurs proviennent essentiellement du minerai de plomb de Saint Jean d’Auxelles, lequel minerai est mal trié, mal tassé ce qui risque de faire éclater le four… ».
Il faut croire que cette usine construite aux frais de l’empereur, n’apporta pas les espérances escomptées puisqu’elle est revendue aux Stadion pour 18 000 livres bâloises le 3 septembre 1591, le jour même où ceux-ci acquéraient également la fonderie de Malvaux.
Sa situation particulière lui permettra de survivre bien longtemps après les trois autres. En effet, l’emplacement choisi, au pied du Montjean à la hauteur du village de Lepuix-Gy, juste en amont du confluent de la Beucinière et de la Savoureuse (tissage du Pont) lui permettait de dériver pour elle seule par un canal de près de 800 m de longueur, toutes les eaux de la rivière, lesquelles, restituées ensuite à leur cours naturel pouvaient alimenter la fonderie bâloise située en aval.
Sa production propre entre 1590 et 1594 est incertaine puisqu’elle est comprise avec celle des deux autres fonderies (Chauveroche et Malvaux).
Les bâtiments en bois sont pillés en juillet 1635 puis incendiés par les Croates le 19 décembre. Elle ne fonctionne plus que par intermittence entre 1636 et 1637, puis les fourneaux s’éteignent par manque de combustible. La dernière livraison de « billons d’argent » à Ensisheim, s’était faite le 27 mars 1637 à dos d’homme (89). Lorsque le comte de la Suze reprend l’exploitation à son propre compte, l’usine est en piteux état, mais après quelques réparations sommaires, les fontes reprennent sous la conduite du anwalt-hutmann : Jean Viellard.
À partir de 1646, toutes les mines du Rosemont sont concédées à un seul « bailleur » pour des périodes courtes de 3 à 9 ans. On assiste alors à une nouvelle restructuration de l’exploitation, les entrepreneurs concentrant désormais leurs efforts sur les trois principales mines encore productrices : Pfennigthurm, Saint Pierre et Saint Jean d’Auxelles. Une seule fonderie est reconstruite à l’emplacement le plus approprié au roulement de l’usine pendant toute l’année et surtout en été à l’époque d’étiage des rivières. Il fallait de plus qu’elle ne gêne pas le fonctionnement des roues hydrauliques de Pfennigthurm et Saint Pierre ; le choix de l’emplacement de l’ancienne fonderie autrichienne, située sous la « roche du Sarrazin », à l’entrée du village de Lepuix (tissage du Pont actuel) semblait tout indiqué.

(Fin de l’extrait du chap. 5)

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